Dire " mythe ", c'est parler le grec ancien ou plus précisément le grec de Platon qui le premier employa de façon systématique, dans le sens de " mythe ", le mot mûthos, dont l'acceptation habituelle était auparavant " pensée qui s'exprime, avis ". Lorsqu'il fait usage du mot mûthos, Platon décrit et critique. A l'aide de ce mot, il décrit un discours d'un certain type, tout en le situant par rapport à un autre discours, celui qui dit le vrai. La première partie de ce livre analyse le témoignage de Platon sur ce qu'est le mythe. En l'occurrence, le mythe apparaît comme le discours par lequel est communiqué tout ce qu'une collectivité donnée conserve en mémoire de son passé et tout ce qu'elle transmet oralement d'une génération à l'autre, que ce discours ait ou non été élaboré par un technicien de la communication (le poète, par exemple)/ Dans une seconde partie sont passées en revue les critiques faites par Platon à ce type de discours qu'est le mythe. Le mythe n'est ni un discours vérifiable ni un discours argumentateur. Cela n'empêche pas Platon de reconnaître une utilité au mythe qui s'intègre ainsi à l'exposé philosophique. Cet ouvrage, où interviennent ethnologie et philosophie, se fonde sur une enquête lexicologique qui débusque toutes les apparitions de mûthos, c'est à dire tous les dérivés et tous les composés dont mûthos constitue le premier terme. D'où son titre : Platon les mots et les mythes.
Une critique fondamentale du messianisme révolutionnaire et de la pensée classique de l'émancipation.
Le siècle qui devait accoucher de toutes les émancipations est en train de finir comme un crépuscule mélancolique. Les expériences révolutionnaires ont tragiquement échoué, et le capitalisme, sous sa forme du libéralisme à outrance, paraît désormais aussi inévitable que le coucher du soleil, qui plonge dans l'ombre des millions d'hommes et de femmes auxquels on demande de se résigner. Et pourtant... Au Chiapas ou en Afrique du Sud, en Belgique ou en France, les sans-terre, les sans-papiers, les sans-travail, tous ces " sans " là, paraissent ignorer le diktat des grands de ce monde. En prenant appui sur l'analyse de ces nouvelles formes de radicalité, et sur l'étude critique d'expériences plus anciennes (notamment des guérillas d'Amérique latine), les auteurs proposent dans ce livre une critique fondamentale du messianisme révolutionnaire et de la pensée classique de l'émancipation, qui ne concevait la liberté que comme la conséquence de la prise du pouvoir. Et ils explorent les voies d'une autre radicalité, plus porteuse de changements et d'espoir, et qui saurait éviter les pièges du pouvoir : celle d'une pratique de la liberté toujours en actes, ici et maintenant, et qui ne serait plus simple promesse.
L'analyse des rapports de la philosophie et des mathématiques à propos du calcul infinitésimal, donne à voir des bouleversements historiques considérables : l'éclosion des grandes philosophies classiques de l'infini, et leur décadence rapide, les formes originales de fonctionnement que la philosophie a assurées de la Renaissance au XVIIIe siècle, vis-à-vis des recherches mathématiques, les sources d'une nouvelle idéologie plus cachée, celle de la rigueur, avec son double aspect : autonomie de la philosophie et suffisance des mathématiques, les vraies raisons enfin de la scission entre savants et philosophes dès le XVIIIe siècle. Ces mouvements historiques tournent autour de quelques grandes mutations scientifiques de long terme, en particulier la montée du calcul et sa domination progressive sur la géométrie. Mais ils sont aussi les effets des difficultés de la philosophie à transformer les intuitions qu'elle continue à emprunter à la géométrie, à penser à la fois le fini et le défini par rapport à l'infini et à l'indéfini, à distinguer le concept d'infini et l'infinité du concept. Les mathématiciens Euler et Lagrange, marquent deux étapes primordiales pour comprendre ce processus : le triomphe, encore empirique, du calcul sur la géométrie, et l'apparition de l'idéologie de la rigueur et d'un certain abandon devant le concept ; en référence à ces travaux qu'il exploite, Hegel témoigne du moment où la philosophie classique de l'infini achève de disparaître, et cède confusément la place à une nouvelle manière de philosopher, issue de l'attention à l'histoire, embarrassée de fiction, que les philosophes manifestent dès le XVIIIe siècle. Ce livre est un premier produit de la collaboration de mathématiciens et de philosophes, à partir d'un cours et de groupes de travail réunis à l'E.N.S., rue d'Ulm.
Cet ouvrage reprend une série d'articles parus dans la revue Esprit, qui témoignent de l'histoire intellectuelle française du XXe siècle. Ces différents essais présentent et discutent l'oeuvre de penseurs pour le moins originaux, et dont bien souvent les écrits et les engagements personnels ont profondément marqué une époque et une génération : Boris Souvarine, Raymond Aron, Jean-Paul Sartre, Maurice Merleau-Ponty, Claude Lévi-Strauss, Georges Dumézil, Paul Ricoeur, Éric Weil, Mikaël Dufrene, Michel Foucault, Jacques Lacan, sans oublier Georges Bataille et le Collège de sociologie (Jules Monnerot et Roger Caillois), et Edgar Morin et la revue Arguments (Kostas Axelos et Jean Duvignaud). En suivant ces étonnantes traversées de notre siècle, nous pouvons établir la carte de la pensée française, cette géographie complexe aux nombreuses zones de tension. Nous pouvons aussi suivre les cheminements de chacun et dessiner des filiations, des croisements ou bien encore des parcours parallèles, sans aucun point de rencontre, mais tous s'inscrivant profondément dans un espace européen et dans une histoire occidentale du monde. C'est, finalement, cette histoire - et les philosophies qui l'explicitent - qui, de fait, donne son unité à cet ensemble de textes, et autorise la confrontation de ces pensées.
Que de philosophes aujourd'hui ! Voici les trafiquants du nihilisme, les inflationnistes de la petite et personnelle misère ; les flûtistes du capital et de la subversion nomadique ; les sous-hommes nietzschéens, et les proclamateurs du sexe ; voici la termitière des épistémologues laborieux. Dans le ciel, la procession des anges, vertus, trônes, dominations et séraphins. Sur la terre, les résignés du maître et de la loi. Les exégètes des discours, et les thuriféraires de la textualité. Ceux, qui, dans Le Nouvel Observateur, déclarent solennellement que Dieu n'est pas si mort qu'il en a l'air. Ceux qui, dans la stupeur, à la sortie du dernier séminaire, nouent les obscures ficelles du noeud borroméen. Ceux qui ont vu, de leurs yeux vu, que le soixante-quatorzième enterrement de Marx, ou de Lénine, était, sans conteste, le bon. Ceux qui haïssent la pensée, le marxisme, et le prolétariat (mais ont-ils seulement la force de la haine ?). Ceux qui aiment leur moi, leur sexe, et leur voix (mais ont-ils seulement la force de l'amour ?). Et les apôtres de la mauvaise foi, ceux qui se font des clientèles en baptisant marxistes les antiques conclusions bourgeoises sur Staline, ou sur l'affaire Lyssenko. Ceux qui conseillent, amicalement, au P.C.F., de conserver dans ses bocaux d'étalagiste la dictature du prolétariat, car on ne sait jamais. Ceux qui se prévalent de sciences ignorées, de révoltes écrasées, de textes falsifiés, pour tenir la partition du ténor d'opérette au choeur de l'eurocommunisme. Mais tous ces diseurs de la bonne aventure spéculative, charlatans ou retraités sincères, se tiennent là où l'histoire les assigne : qu'en est-il aujourd'hui de la Révolution ? Et ceux-là même qui vendent à la bourgeoisie, avec leur âme, les formulations pompeuses du défaitisme vulgaire, il faut les voir, eux aussi, sur la ligne de front, telle qu'entre deux tempêtes elle paraît se fixer. Ce cahier comporte une analyse de la conjoncture philosophique, et cinq études : deux sur Deleuze, deux sur les lacaniens, une sur les althussériens.
Un spectre hante la philosophie : celui du nietzschéisme. Toutes les puissances de la vieille et de la nouvelle philosophie se sont unies pour traquer Nietzsche. Les fables les plus fantaisistes courent à son sujet. D'où l'intérêt d'opposer à tous ces contes le récit authentique et les documents qu'a confiés le spectre lui-même à Marc Sautet, docteur en philosophie, et au dessinateur Patrick Boussignac.
Ce livre illustré, publié pour la première fois en 1986, s'inscrit dans la fameuse collection de vulgarisation « Pour débutants », dont la plupart des titres n'ont pas pris une ride.
Une mise au point magistrale, d'une irrésistible drôlerie et accessible au plus large public.
« Voici donc un petit Nietzsche illustré expliqué aux enfants. Mais aussi aux adultes : à tous ceux qui ne connaissent pas bien le créateur de Zarathoustra mais estiment qu'il serait bon de changer ça. La notion d'"éternel retour" est "éclaircie" en un seul dessin ! »
Libération
« Si vous n'avez jamais rien compris à ce que disait Zarathoustra, Nietzsche pour débutants vous apprend en cinq mouvements tout ce qu'il faut savoir. Peu de texte et plein de dessins marrants. »
L'Étudiant
Michel Sautet (prématurément disparu en 1996), lauréat de la Fondation Goethe de Bâle pour sa thèse sur Nietzsche, a été l'inventeur du premier « Café de philosophie ».
Patrick Boussignac, dessinateur, a également illustré et mis en scène un Brecht pour débutants, plein de brio.
Les textes rassemblés dans ce volume ont été présentés lors d'un colloque qui s'est tenu au Centre culturel international de Cerisy-la-Salle du 5 au 12 juin 1993. Organisé par le CREA (École polytechnique et CNRS), il a réuni certains des meilleurs spécialistes français et étrangers de la question de la rationnalité.
L'analyse des collectifs constitue la question clé des sciences sociales. En un sens, tout a été dit sur cette notion, ceci allant d'un marxisme orthodoxe où l'individu n'existe qu'en tant que porteur d'institutions, à une philosophie sociale libérale, soutenue par un Ludwig Von Mises : " Une collectivité n'a pas d'existence et de réalité, autres que les actions des individus membres. [...] Ce sont des actions définies d'individus qui constituent le collectif. " En un autre sens, tout reste à dire, une fois que l'on s'est débarrassé de la question de la prééminence du collectif sur l'individuel. Car comme le souligne Wittgenstein, un problème insoluble est un problème mal posé. Prenant acte de ce changement de perspective, ce livre explore les figures du collectif, dans un inconfortable entre-deux, entre une indivisibilité totale et une visibilité aveuglante ? Comment un collectif tient-il Comment se reconstruit-il au travers des crises ? Ce livre illustre l'apport des différentes sciences sociales à l'analyse des collectifs : la question de l'émergence des normes et de la coopération implique, en effet, de donner un statut analytique rigoureux aux notions de règles, d'apprentissage organisationnel, et de savoir collectif. Les contributions ici présentées s'attachent à définir ce que sont ces dispositifs collectifs cognitifs qui encadrent et servent de support aux décisions individuelles. Les textes rassemblés dans ce volume ont été présentés lors d'un colloque qui s'est tenu au Centre culturel international de Cerisy-la-salle du 5 au 12 juin 1993. Organisé par le CREA (École polytechnique et CNRS), il a réuni certains des meilleurs spécialistes français et étrangers de la question.
Notre raison est sollicitée par deux abîmes qu'elle répudie tour à tour : ne sommes-nous que des marionnettes impuissantes, vivant dans un monde marqué par un implacable déterminisme ? Ou bien, le monde réel est-il gouverné par le seul hasard, qui ferait de nous, au mieux, des matelots ivres ? Pour Rémy Lestienne, face à cette double désespérance, la question clé est celle de la réalité ou de la subjectivité du hasard.
Notre raison est sollicitée par deux abîmes qu'elle répudie tour à tour : ne sommes-nous que des marionnettes impuissantes, vivant dans un monde marqué par un implacable déterminisme ? Ou bien, le monde réel est-il gouverné par le seul hasard, qui ferait de nous, au mieux, des matelots ivres ? Pour Rémy Lestienne, face à cette double désespérance, la question clé est celle de la réalité ou de la subjectivité du hasard. Accompagnant un mouvement encore minoritaire mais croissant de réflexion épistémologique, il s'adresse à la science pour découvrir des indices nouveaux pour ou contre la réalité du hasard. En refermant ce livre, on sait quel est son choix : celui de la réalité du hasard, qu'il lie à la réalité du devenir, selon une tradition initiée en 1859 en physique par James Clerk Maxwell et en biologie par Charles Darwin. Depuis les travaux de ces deux pionniers, il montre que bien d'autres découvertes sont venues apporter de l'eau au moulin des partisans d'un hasard objectif, venues d'horizons aussi divers que l'exploration du système immunitaire et celle du système nerveux, l'observation de l'Univers et l'étude des phénomènes microscopiques régis par la mécanique quantique. Cs indices ne nous poussent pas pour autant à abandonner le programme scientifique : l'idéal scientifique consiste à repousser toujours plus loin les frontières du hasard, et non point d'affirmer dogmatiquement qu'il n'existe pas.
Après la dénonciation sans appel du totalitarisme soviétique et la preuve par le goulag en 1976, puis l'écroulement du mur de Berlin en 1989, beaucoup d'intellectuels se sont trouvés désorientés. Rendre compte à chaud d'une histoire dont les effets ne sont pas totalement déployés est la gageure que tente ici Olivier Mongin.
Après la dénonciation sans appel du totalitarisme soviétique et la preuve par le goulag en 1976, puis l'écroulement du mur de Berlin en 1989, beaucoup d'intellectuels se sont trouvés désorientés, comme décrochés d'une histoire dont le sens leur échappait. Le nouveau rôle social des médias a accentué ce malaise, en excluant bien souvent les intellectuels des moyens d'expression de leur propre savoir. Rendre compte à chaud d'une histoire dont les effets ne sont pas totalement déployés est la gageure que tente ici Olivier Mongin. Il ne propose ni une histoire exhaustive des intellectuels ni une sociologie des clercs, mais un état des mutations de la pensée contemporaine en France, sans négliger les courants esthétiques et littéraires. Ce panorama, nourri d'une abondante bibliographie, est aussi une présentation critique des pensées novatrices qui se font jour face au scepticisme ambiant, et des écoles, des lieux où celle-ci s'élaborent et se diffusent. Cet essai est sous-tendu par une thèse : le désenchantement démocratique qui prévaut aujourd'hui reflète l'épuisement de la polarisation entre le singulier et l'universel, qui structurait la communauté intellectuelle française depuis la Déclaration des droits de l'homme. Sans " vision du monde ", l'intellectuel ne peut plus remplir une de ses fonctions, donner du sens à l'histoire. Est-il pour autant condamné à disparaître ? Olivier Mongin refuse cette éventualité : pour lui, la démocratie n'avance et ne se renouvelle qu'avec des idées, donc des débats et des confrontations. Et il faut pour cela des " passeurs " et des éveilleurs " : telle est la mission de la nouvelle figure que l'auteur appelle de ses voeux, celle de l'" intellectuel démocratique ".
Dans les dialogues imaginés par Platon, Socrate ne cesse d'invoquer le bien. Qu'est-ce qui se cache ainsi derrière le nom du bien chez Platon ? Est-ce la justice, la « vertu » ? Un dieu ? Le monde en sa belle « âme » ? Dieu lui-même ou alors, à l'opposé, l'émotion du plaisir ? À ce problème, Luc Marie Nodier répond avec une passion insolite, et aussi quelque insolence si on considère à quel point les lectures reçues de Platon esquivent cette question. Malgré - ou plutôt à cause de - son dessein critique, son enquête vise d'abord la reconstitution d'une théorie platonicienne de la douleur et du plaisir, rarement perçue avec clarté, dont il est montré qu'elle est à la fois plus cohérente et plus digne d'être interrogée qu'il n'a semblé jusqu'ici. Elle peut, en outre, servir de préparation et d'incitation au renouveau de la pensée athéologique. Si cet ouvrage étonnamment écrit paraît dans une collection vouée aux sciences sociales, c'est parce que ces dernières, qui se croient à mille lieues de la philosophie et de Platon, feraient bien de s'interroger à propos de cette méditation. Car que veulent-elles dire lorsque, analysant la société, elles mettent en avant des sujets supposés rationnels, qui chercheraient à maximiser leur satisfaction ? Ne présupposent-elles pas ainsi qu'on cherche toujours son bien ? Mais comment le trouver si nous ignorons tout de la nature du bien ?