« À travers l'analyse, précise et fine, des institutions, des oeuvres écrites, des documents, la question que Louis Gernet ne cessa de poser au monde ancien nous concerne de façon directe ; elle nous met nous-mêmes en cause : pourquoi et comment se sont constitués ces formes de vie sociale, ces modes de penser, où l'Occident situe son origine, où il croit pouvoir se reconnaître, et qui servent - aujourd'hui encore - à la culture européenne de référence et de justification ? Envisagé de ce point de vue, ce qu'on appelle traditionnellement l'« humanisme », se trouve remis à sa place, situé historiquement, relativisé. Mais dépouillée de sa prétention à incarner l'Esprit absolu, la Raison éternelle, l'expérience grecque retrouve couleur et relief. Elle prend tout son sens dès lors que, confrontée aux grandes civilisations différentes, comme celles du Proche-Orient, de l'Inde, de la Chine, de l'Afrique, et de l'Amérique précolombienne, elle apparaît comme une voie, parmi d'autres, dans laquelle l'histoire humaine s'est engagée.
« Louis Gernet était mieux armé que quiconque pour mener son enquête dans cette ligne. Philosophe et sociologue, autant qu'helléniste, il appartenait à la génération des Herz, Mauss et Granet, qui furent tous de ses amis, et dont il avait la stature intellectuelle. Qu'on relise son premier article, de 1909, sur l'approvisionnement d'Athènes en blé au Ve et IVe siècles, ou sa thèse de Doctorat sur le développement de la pensée juridique et morale de Grèce, si fortement marquée par l'influence durkheimienne, qu'on les compare aux études qu'au soir de sa vie il faisait paraître dans le Journal de Psychologie, on y retrouvera ce double et constant souci : partir des réalités collectives, à tous les niveaux, en cerner la forme dense, en bien mesurer le poids social, mais ne jamais les séparer des attitudes psychologiques, des mécanismes mentaux, sans lesquels ni l'avènement, ni la marche, ni les changements des institutions ne sont intelligibles. »
J.-P. Vernant (Extrait de la préface).
« Ces gens-là » ce sont les habitants d'une cité de transit auprès desquels l'auteur a enquêté systématiquement. « Nous devons remercier Colette Pétonnet de nous donner aujourd'hui un livre passionnant, admirablement pensé et écrit sur ce sujet, écrit Roger Bastide dans sa préface, mais il faut aller plus loin ; il faut la féliciter d'avoir appliqué à ce sujet les méthodes de l'ethnologie, en vivant dans la cité qu'elle décrivait, en utilisant l'observation participante, les entretiens continus, au fil des heures et des saisons. Ce qui fait que la Cité de La Halle revit devant nous, avec ses commérages dans les couloirs, ses drames ou ses moments de fête, les rites secrets des caves et les aventures des jeunes dans la « brousse » environnante. Car la « maison » ici, ce n'est pas seulement l'appartement, c'est aussi le couloir, l'escalier, les caves ou la cour, chaque sous-groupe, groupe sexuel ou groupe d'âge, ayant son domaine propre, qu'il façonne et qui le façonne. »
Dire " mythe ", c'est parler le grec ancien ou plus précisément le grec de Platon qui le premier employa de façon systématique, dans le sens de " mythe ", le mot mûthos, dont l'acceptation habituelle était auparavant " pensée qui s'exprime, avis ". Lorsqu'il fait usage du mot mûthos, Platon décrit et critique. A l'aide de ce mot, il décrit un discours d'un certain type, tout en le situant par rapport à un autre discours, celui qui dit le vrai. La première partie de ce livre analyse le témoignage de Platon sur ce qu'est le mythe. En l'occurrence, le mythe apparaît comme le discours par lequel est communiqué tout ce qu'une collectivité donnée conserve en mémoire de son passé et tout ce qu'elle transmet oralement d'une génération à l'autre, que ce discours ait ou non été élaboré par un technicien de la communication (le poète, par exemple)/ Dans une seconde partie sont passées en revue les critiques faites par Platon à ce type de discours qu'est le mythe. Le mythe n'est ni un discours vérifiable ni un discours argumentateur. Cela n'empêche pas Platon de reconnaître une utilité au mythe qui s'intègre ainsi à l'exposé philosophique. Cet ouvrage, où interviennent ethnologie et philosophie, se fonde sur une enquête lexicologique qui débusque toutes les apparitions de mûthos, c'est à dire tous les dérivés et tous les composés dont mûthos constitue le premier terme. D'où son titre : Platon les mots et les mythes.
L'histoire de la colonisation s'est inscrite dans le face à face des institutions, des esprits et des cultures. Ce regard croisé est à l'origine de ce livre, fruit d'un travail d'équipe mené depuis plusieurs années par les meilleurs spécialistes africains et français, qui ont mobilisé des archives ouvertes parfois depuis peu, et les souvenirs oraux d'acteurs souvent encore en vie. L'Afrique " vue d'en bas " : c'est sur une histoire méconnue que ce livre original lève le voile ; Malgré sa brièveté relative, l'épisode colonial a profondément marqué les États de l'ancien Ouest africain français. Ils sont neuf aujourd'hui, d'ouest en est et du nord au sud : Mauritanie, Sénégal, Niger, Burkina-Faso, Guinée, Côte d'Ivoire, Bénin, Togo. Or, tandis que la politique " métropolitaine " commence à être bien connue, il n'en va pas de même de la rencontre entre colonisés et colonisateurs, de l'histoire vécue sur le terrain, tour à tour et à la fois lutte, dialogue et échanges.
L'histoire de la colonisation s'est inscrite dans le face à face des institutions, des esprits et des cultures. Ce regard croisé est à l'origine de ce livre, fruit d'un travail d'équipe mené depuis plusieurs années par les meilleurs spécialistes africains et français, qui ont mobilisé des archives ouvertes parfois depuis peu, et les souvenirs oraux d'acteurs souvent encore en vie.
La première partie traite de thèmes communs à l'ensemble : la politique et la géopolitique françaises, l'armée coloniale, les objectifs économiques, les dynamiques sociales, le rôle de l'islam. La seconde partie rassemble les monographies consacrées à chacun de ces " États coloniaux " : ils ont été marqués par une histoire chaque fois différente, suivant des milieux géographiques contrastés, des péripéties antérieures, des héritages démographiques et culturels anciens, et les modalités spécifiques de la pénétration française.
Au total, un ouvrage de référence indispensable pour comprendre, dans les États francophones de l'Afrique de l'Ouest, l'unité et la diversité des soubresauts et des aspirations d'autrefois et d'aujourd'hui.
Peut-on, aujourd'hui, s'intéresser au travail, à l'emploi, au chômage, sans voir la différence des sexes ? La question est moins saugrenue qu'il n'y paraît. Longtemps, les sciences sociales du travail ont ignoré le genre, l'ont traité comme une variable secondaire, subalterne et facultative. Nous n'en sommes plus là aujourd'hui, et c'est heureux. Ce livre tente de décrire, discipline par discipline, l'émergence d'analyses sexuées du monde du travail. Il montre comment l'introduction du masculin/féminin renouvelle les approches, les problématiques et les concepts. Il explicite également les difficultés, les blocages et les embûches de l'exercice : le temps de la connaissance n'est pas toujours celui de la reconnaissance. Retracer le parcours de la question des différences de sexe dans les sciences sociales du travail : tel est l'objet de cet ouvrage collectif pluridisciplinaire et international. Organisé par le groupement de recherche MAGE (Marché du travail et genre en Europe), il rassemble vingt-deux contributions émanant de sociologues, d'historien(ne)s, d'économistes, de statisticien(ne)s, de juristes, de politologues, de philosophes et d'anthropologues venus de différents pays.
Pierre Vallières, journaliste québécois de 35 ans rédacteur du Devoir, co-directeur de « Cité Libre » puis animateur de « Parti-Pris » et enfin fondateur de « Révolution québécoise », a été arrêté en 1967 à New York alors qu'il manifestait en compagnie de son camarade Charles Gagnon sa solidarité avec des militants du Front de Libération du Québec. Lui-même militant de cette organisation, il devait être accusé de la responsabilité politique et morale (à défaut de la responsabilité matérielle dont il a toujours été admis qu'elle n'était pas en cause) d'un attentat meurtrier commis contre une usine qui venait de lock-outer ses ouvriers grévistes. Extradé au Québec, il a été condamné, en 1968, à la prison à vie, peine qu'il subit au pénitencier de Montréal. Cet essai écrit en prison est à la fois l'autobiographie d'un jeune ouvrier canadien autodidacte et l'analyse de la situation de ces Québécois qui, pour lui, dans le monde américain, font figure de "nègres blancs".
Au début de la guerre d'Algérie ", à l'automne 1956, fut tentée, par les services secrets français, en Kabylie, chez les Iflissen Lebhar, l'opération " Oiseau bleu ". Elle consistait dans la création de " contre-maquis " clandestins destinés à discréditer le FLN. Or, c'est à l'avantage de ce dernier qu'à tourner cette affaire, les hommes recrutés et armés par les services français s'étant révélés être des " rebelles ". Ce drame, longtemps tenu secret et encore largement ignoré des historiens, est le point de départ de ce livre d'ethnologie original à plus d'un titre. Comment les services secrets ont-ils pu se tromper ainsi, bien qu'un ethnologue, supposé bon connaisseur de la région, ait joué un rôle important dans ce plan ? En réalité, l'opération " Oiseau bleu " est un révélateur des illusions de l'administration coloniale et de certains ethnologues, mais aussi de l'évolution profonde de la société kabyle. De longues enquêtes auprès des Iflissen, et la consultation des archives de l'armée française (1954-1962), ont permis à l'auteur, elle-même ethnologue, spécialiste de l'Algérie, non seulement d'élucider cette étrange affaire, mais d'en analyser les raisons profondes. Grâce à une conception renouvelée de l'ethnologie, qui prend en compte l'histoire, celle d'un certain nombre de villages, avant même la conquête coloniale jusqu'au temps présent, en passant par la guerre d'indépendance, sont étudiés les multiples changements qui ont affecté la vie des habitants de cette région. Cette étude permet de mieux comprendre ce qui fait encore la spécificité kabyle dans la crise que connaît aujourd'hui l'Algérie.
La violence à l'école défraie tous les jours la chronique. Elle est devenue une préoccupation majeure du ministère de l'Éducation nationale, et de l'ensemble du corps social : des colloques sont organisés pour réfléchir à des solutions, et des mesures sont prises - à tous les niveaux - pour encadrer les « barbares » que seraient les nouveaux collégiens et lycéens, mais elles se révèlent trop souvent insuffisantes et inefficaces. Plusieurs fois réédité depuis sa première publication en 1988, ce livre a été le premier à mettre en cause le fonctionnement de l'institution elle-même : il montre que la violence à l'école trouve largement son origine dans la violence de l'école. La thèse que Bernard Defrance défend, depuis plus de vingt ans, commence à être entendue : tant qu'on ne s'attaquera pas aux violences ordinaires, consubstantielles à notre système scolaire, qui s'exercent quotidiennement contre les élèves (brimades diverses, interrogatoires humiliants, notations empiriques, procédures de sélection, punitions illégales...), on ne résoudra rien. Et les établissements, en tout premier lieu ceux des quartiers défavorisés, continueront à être des marmites sous pression. Cette nouvelle édition est entièrement actualisée : elle tient compte des dernières études, et les propositions pour agir et prévenir s'appuient sur les évolutions récentes. Une lecture indispensable pour tous les professionnels concernés, et pour les parents sensibles aux problèmes de l'école.
Une analyse précise et originale du régime de vérité en temps de guerre.
Rumeurs, légendes, propagande et témoignages de l'expérience de guerre : tous ces phénomènes montrent qu'un nouveau régime de vérité se mit progressivement en place pendant la Première Guerre mondiale. Devenus invérifiables souvent pour les raisons matérielles nées du conflit, au moment même où les sociétés belligérantes étaient en proie à un doute général, les faits devinrent plus difficiles à établir. L'État favorisa cette incertitude en installant son propre système d'information : censure et " bourrage de crâne " alimentèrent nombre de commentaires contemporains. Mais il ne fut pas le seul responsable. Combattants sur le front, civils à l'arrière, livrèrent aussi des " vérités " participant d'une " culture de guerre " nécessaire à la mobilisation des populations. Contribution à cette histoire, cet ouvrage collectif propose une relecture de la Première Guerre mondiale, à la lumière des catégories de " vrai " et de " faux ", ébranlées par l'état de guerre. Les auteurs montrent aussi que le nouveau mode d'établissement de la vérité se poursuivit après guerre : les controverses autour du bon ou du mauvais témoignage rejoignirent les polémiques politiques lancées par les pacifistes ; les États, pour leur part, s'affrontèrent sur les responsabilités de la guerre autour d'une querelle sur des faits toujours difficiles à étayer. De l'incertitude vécue durant les hostilités aux mémoires contestées par la suite, le négationnisme historique sut se nourrir de ce brouillage entre le " vrai " et le " faux ", après la Seconde Guerre mondiale, aux fins de fragiliser la réalité de l'extermination nazie. L'ouvrage montre enfin que l'analyse de la Grande Guerre peut être un modèle utile à l'analyse des grands conflits, jusqu'aux plus contemporains, y compris la guerre d'Irak en 2003, qui se comprendra peut-être mieux.
Qu'il s'agisse de technique, d'organisation du travail, d'éducation ou de bien d'autres domaines, l'innovation est un processus permanent, au coeur de la dynamique des sociétés modernes. Comprendre et maîtriser ses mécanismes sont désormais des enjeux majeurs. Or ceux-ci sont plus complexes qu'on ne le pense. D'où l'intérêt de cet ouvrage, qui présente les résultats d'une recherche pluridisciplinaire sur ces questions. Des chercheurs reconnus pour leurs contributions à l'étude du changement et de l'innovation y analysent les éléments favorisant l'émergence et la diffusion de la nouveauté, mais également son appropriation ou son rejet. L'innovation y est conçue comme un facteur d'accélération de la dynamique économique et sociale, produisant des capacités d'adaptation et de mobilisation, mais aussi des conflits entre acteurs, institutions et individus. L'innovation pose ainsi centralement la question de la coopération, de la négociation, du conflit et de la déviance. Parce que ces questions ne peuvent être sérieusement traitées par une seule discipline, ce livre en mobilise plusieurs. Et il réussit le pari de les amener à travailler en commun. Mais il ne défend pas une " école ". Au contraire, il sollicite le débat. Il s'adresse donc à tous ceux ? étudiants, formateurs, chercheurs et praticiens ? qui cherchent à connaître les enjeux et les acteurs de l'innovation.
Qu'ont à nous dire les sciences sociales sur la société ? Peuvent-elles nous aider à comprendre le monde, et à agir pour le changer ?
Qu'ont à nous dire les sciences sociales sur la société ? Peuvent-elles nous aider à comprendre le monde, et à agir pour le changer ? Si l'on se donne la peine de regarder de près la production des chercheurs, au-delà des quelques grands intellectuels qui monopolisent l'attention des médias, la réponse à ces questions apparaît fort embarrassante. Car la majorité des spécialistes en sciences sociales semblent avoir renoncé à se saisir du politique : réfugiés derrière les murs de leur discipline ou de leur sous-discipline, ils ne savent plus interroger l'époque, ni répondre à l'exigence démocratique qui sourd de partout. Ce sont les formes et les causes de cette " démission des clercs " qu'explore avec rigueur Alain Caillé dans cet essai roboratif. À partir d'une critique remarquablement argumentée de théories dominantes de la sociologie, de l'économie et de la philosophie politique, il montre comment l'oubli du politique s'inscrit au coeur même de ces théories. Ainsi de l'utilitarisme et de l'individualisme méthodologique, qui ne permettent pas de reconnaître la dimension plurielle et collective de l'action sociale. Mais ce livre, n'est pas qu'un état des lieux critique de la recherche et des idées contemporaines. Il pose les bases d'un programme de travail pour les sciences sociales : sans rien céder sur les exigences d'un savoir rigoureux, elles doivent inventer de nouvelles formes de citoyenneté qui soient universalisables, et en même temps capables de reconnaître les singularités historiques et culturelles dans lesquels les hommes puisent leurs raisons de vivre et d'espérer.
Mettre en relation le travail et la famille n'est jamais évident, et le premier mérite du livre de Jacques Commaille est de montrer comment les femmes s'y appliquent, comment elles gèrent les demandes, les incitations et les pressions qui pèsent sur elles de toutes parts.
En quelques dizaines d'années, l'engagement professionnel des femmes est devenu un phénomène massif, et vraisemblablement irréversible. En même temps, les femmes continuent d'exercer d'importantes responsabilités familiales. D'un côté, le travail, de l'autre, la famille : mettre en relation ces deux univers n'est jamais évident, et le premier mérite du livre de Jacques Commaille est de montrer comment les femmes s'y appliquent, comment elles gèrent les demandes, les incitations et les pressions qui pèsent sur elles de toutes parts. S'appuyant sur un volume considérable de recherches et d'études, Jacques Commaille propose dans cet ouvrage un bilan des connaissances disponibles, mais aussi beaucoup plus. Il dégage les deux logiques contradictoires qui traversent aussi bien les femmes elles-mêmes que les débats intellectuels et politiques, et les institutions publiques : le "familialisme" de ceux et celles qui entendent maintenir et promouvoir le rôle domestique des femmes s'opposant au "féminisme" lorsque celui-ci valorise avant tout le travail et l'insertion professionnelle. Et l'on ne s'en sort pas en se contentant de formules mythiques plaidant pour une meilleure articulation des orientations. Mais les termes du débat sont-ils convenablement posés par ceux qui l'étudient ? C'est un autre intérêt du livre de Jacques Commaille que de nous inviter à sortir des sociologies fermées sur elles-mêmes - sociologies du travail, de la famille, des femmes, des politiques publiques - pour aborder la question sous l'angle de la mutation culturelle, politique et sociale, dans laquelle notre société redécouvre la notion de sujet et apprend à redéfinir la place du "privé" et celle du "public".
Gil Delannoi, dans cet essai au ton personnel, brosse un tableau de la vie intellectuelle de cette époque (1968-1978) en éclairant ce que d'habitude on laisse dans l'ombre afin de magnifier ou de déprécier l'ensemble.
Mai 68 a davantage marqué les comportements que produit une nouvelle culture. En effet, peu d'oeuvres s'en inspirent directement, excepté un "art" de propagande soumis à une idéologie ; par contre, l'esprit de mai, conmme si de rien n'était, a entièrement imprégné l'atmosphère de cette décennie. A droite comme à gauche, la pensée n'est plus la même après ces "événements". De nouvelles préoccupations (démocratie directe, féminisme, auto-gestion, écologie, autonomie, etc.) appellent au renouvellement des théories (psychanalyse, marxisme, structuralisme, etc.). Gil Delannoi, dans cet essai au ton personnel, brosse un tableau de la vie intellectuelle de cette époque, en éclairant ce que d'habitude on laisse dans l'ombre afin de magnifier ou de déprécier l'ensemble. Ces dix années sont avant tout marquées du sceau de l'utopie ; les certitudes des "contestataires" tout comme les discours défensifs des "contestés" relèvent de l'utopie. Démêler le rêve de la réalité et comprendre comment chacun joue sur l'autre constitue le fil conducteur de cet essai d'histoire politique et culturelle - où l'on retrouve Michel Foucault, Louis Althusser, Jean-Paul Sartre, mais aussi les "situationnistes" et les maoïstes de toutes tendances... Privilégiant les grandes idéologies - alors à l'acmé de leur influence - sans délaisser pour autant le travail solitaire de tel écrivain ou de tel cinéaste, Gil Delannoi apporte une réflexion originale sur une période trop souvent caricaturée.
Dans le monde entier, à la fin des années quatre-vingt, les meilleurs experts comme les simples citoyens ont assisté médusés aux bouleversements de l'ordre du monde, que num n'avait su prévoir. Dans ce livre, Alain Joxe propose une interprétation globale de ce tournant historique : celui-ci marque la fin du cycle impérial de la dissuasion nucléaire, ouverte en 1945 à Hiroshima.
Dans le monde entier, à la fin des années quatre-vingt, les meilleurs experts comme les simples citoyens ont assisté médusés aux bouleversements de l'ordre du monde, que num n'avait su prévoir. Dans ce livre, Alain Joxe propose une interprétation globale de ce tournant historique : celui-ci marque la fin du cycle impérial de la dissuasion nucléaire, ouverte en 1945 à Hiroshima. Une fin dont l'explication structurelle est à rechercher dans la conjonction de trois tournants : l'éclatement des représentations du monde qui ont prévalu depuis quarante-cinq ans (affrontement Est-Ouest, opposition Nord-Sud), le dérèglement de doctrines stratégiques devenues délirantes, la prise de conscience de la folie de la course aux armements. Par une succession de vues d'ensemble et d'effet de zoom sur les moments-clé de cette histoire, l'auteur propose une relecture des étapes successives du "cycle de la dissuasion" : de la phase guerrière initiale aux avatars récents de la doctrine américaine de "riposte flexible", sans oublier les spécificités des écoles de pensée stratégique française et soviétique. Cette démarche apparaît comme un puissant révélateur pour prendre conscience des enjeux de la nouvelle situation créée par l'effondrement de l'empire soviétique et la fin de l'hégémonie américaine : quels seront les nouveaux risques liés à l'avénement d'un "empire du désordre" où la guerre entre puissances centrales aurait disparu et où la société mondiale s'organiserait en sous-ensembles violents, emboîtés ou juxtaposés et fortifiés, pratiquant à l'échelle de la planète comme à l'échelle du quartier l'extorsion et le rackett ? À l'heure où les dirigeants européens s'interrogent sur l'avenir de leurs systèmes de défenses, Alain Joxe, l'un des meilleurs spécialistes français des problèmes stratégiques, apporte à ces questions des réponses qui bouleversent les cadres de pensée établis.
Ce livre présente l'essentiel des textes assyriens écrits à l'époque sur ce que l'on construisait, pourquoi et comment, enfin ce qui devait préserver sinon le monument lui-même, du moins les objets inscrits qui lui servaient de substitut et transmettaient les noms de ses bâtisseurs successifs.
Comme tous les tenants du pouvoir, les rois d'Assyrie ont voulu bâtir et commémorer par un récit, enfoui dans le gros oeuvre, la construction ou la restauration de leurs monuments. Mais ils accordaient au texte une importance unique : conscients de la fragilité de leurs monuments de brique et les sachant voués à une dégradation rapide, ils firent du texte qui y était intégré l'élément fondamental de l'oeuvre, parce qu'il était capable de résister à l'usure du temps. Ce livre présente l'essentiel de ces textes qui sont traduits en français pour la première fois. L'auteur étudie ce que l'on construisait, pourquoi et comment, enfin ce qui devait préserver sinon le monument lui-même, du moins les objets inscrits qui lui servaient de substitut et transmettaient les noms de ses bâtisseurs successifs. Dans la mesure où le monument est moins important que le texte qui le commémore, on peut se demander quelle est la valeur de son apparence et surtout ce que l'on vut transmettre à la postérité par l'écriture : l'idée l'emporte sur la réalité fugitive. Tout cela n'est pas sans conséquence sur la façon d'apprécier dans le cas assyrien ce que dans une perspective occidentale on appellerait l'oeuvre d'art.
Les dirigeants des municipalités cherchent à se décharger de la gestion de services qui deviennent de plus en plus lourds. Le poids de l'idéologie libérale, la pression fiscale croissante et l'offre de firmes internationales les ont conduits à franchir le pas et à transférer au secteur privé la gestion des services urbains.
Les dirigeants des municipalités cherchent à se décharger de la gestion de services qui deviennent de plus en plus lourds. Le poids de l'idéologie libérale, la pression fiscale croissante et l'offre de firmes internationales les ont conduits à franchir le pas et à transférer au secteur privé la gestion des services urbains. Ces privatisations ont moins passionné l'opinion que celles des grandes entreprises et des services publics survenues au cours des dix dernières années. Pourtant, dans nos démocraties, le " gouvernement des villes " prend une importance croissante et certaines firmes privées, qui prennent en concession les services municipaux, ont acquis des dimensions comparables à celles des principales entreprises nationales. Leurs rapports avec la politique ont récemment défrayé la chronique. Cet ouvrage insiste sur les transformations profondes que connaît le secteur des services urbains et montre que, si ce mouvement est international, il se concrétise différemment dans de nombreux pays : silence troublant en France, volontarisme affiché en Grande-Bretagne, consensus cogestionnaire en Allemagne et, entre ces trois modèles, l'Espagne, les pays d'Europe de l'Est (Hongrie, Pologne) et l'Amérique latine cherchent leurs voies.
Jean Bouvier et René Girault poursuivent ici leurs investigations concernant l'histoire économique et politique de l'expansion coloniale et non coloniale de la France (inaugurées avec Jacques Thobie et son livre La France impériale 1880-1914, Mégrelis, Paris, 1982). Dans la première partie, Jean Bouvier présente et confronte les diverses acceptions et conceptions de l'impérialisme. Avec cette histoire du mot et des débats politico-théoriques provoqués par les formes concrètes de l'impérialisme, c'est la problématique même de ce concept qui se trouve explicitée et fondée. La seconde partie, rédigée par René Girault, laisse la connaissance historique prendre le pas sur la réflexion théorique et vise à rendre compte de l'impérialisme français en action dans sa période de maturité : l'entre-deux-guerres. Quels investissements ? Où ? Comment ? Dans quels secteurs ? Pour quelle rentabilité ? Avec quelles répercussions sur l'économie nationale ? Quelle place une telle situation donne-t-elle à la France dans le monde ? Quelles stratégies les groupes financiers et industriels adoptent-ils durant cette période de l'âge d'or de l'impérialisme à la française ? Quelle politique économique préconise l'État dans son empire ? Quelle fonction vise-t-il à remplir ?Les auteurs, chiffres et documents en mains apportent des réponses qui modifient l'habituelle image de l'impérialisme français : ce dernier, en effet, se déploie avec succès en dehors de l'espace colonial... La nouveauté de ce travail repose grandement sur de nombreuses sources inédites ou rarement utilisées : comptes rendus de conseils d'administration, archives ministérielles, presse de l'époque, documents d'entreprises, etc.
Une critique fondamentale du messianisme révolutionnaire et de la pensée classique de l'émancipation.
Le siècle qui devait accoucher de toutes les émancipations est en train de finir comme un crépuscule mélancolique. Les expériences révolutionnaires ont tragiquement échoué, et le capitalisme, sous sa forme du libéralisme à outrance, paraît désormais aussi inévitable que le coucher du soleil, qui plonge dans l'ombre des millions d'hommes et de femmes auxquels on demande de se résigner. Et pourtant... Au Chiapas ou en Afrique du Sud, en Belgique ou en France, les sans-terre, les sans-papiers, les sans-travail, tous ces " sans " là, paraissent ignorer le diktat des grands de ce monde. En prenant appui sur l'analyse de ces nouvelles formes de radicalité, et sur l'étude critique d'expériences plus anciennes (notamment des guérillas d'Amérique latine), les auteurs proposent dans ce livre une critique fondamentale du messianisme révolutionnaire et de la pensée classique de l'émancipation, qui ne concevait la liberté que comme la conséquence de la prise du pouvoir. Et ils explorent les voies d'une autre radicalité, plus porteuse de changements et d'espoir, et qui saurait éviter les pièges du pouvoir : celle d'une pratique de la liberté toujours en actes, ici et maintenant, et qui ne serait plus simple promesse.
Écrit à plusieurs voix par des analystes reconnus du fait associatif, ce livre est le lieu d'un débat particulièrement ouvert qui entend se tenir aussi éloigné de l'angélisme que du cynisme. Sur ces questions essentielles, où se joue l'avenir de l'aspiration démocratique, cent ans après l'adoption de la loi de 1901, il permet de faire la part du souhaitable, du possible et de l'effectif.
La réunion de Porto Alegre (l'anti-Davos), à l'automne 2000, a été considérée par beaucoup d'observateurs comme l'acte de baptême d'une société civile internationale. Fondée sur le foisonnement de myriades d'associations de tous pays et de toutes cultures, elle seule serait à même de réparer ou de limiter les dégâts du marché d'une part, et de desserrer l'emprise des États autoritaires ou dictatoriaux de l'autre. Ces espoirs sont légitimes. Aucune démocratie ne saurait rester ou devenir vivante sans qu'y prolifèrent des associations en tous genres. Il y a cependant loin de la coupe aux lèvres ! Les associations ne sont pas nécessairement et toujours aussi démocratiques qu'elles le proclament. Et ont-elles même une raison d'être véritable et spécifique ? Les entreprises ou les administrations ne sont-elles pas souvent plus aptes et mieux habilitées qu'elles à fournir les services qu'elles prétendent offrir ? Il faut faire toute leur part à ces doutes et à ces critiques de l'association. Mais ne pas non plus s'y complaire, car l'idéal de la société civile associationniste mérite d'être pris au sérieux. Écrit à plusieurs voix par des analystes reconnus du fait associatif, ce livre est le lieu d'un débat particulièrement ouvert qui entend se tenir aussi éloigné de l'angélisme que du cynisme. Sur ces questions essentielles, où se joue l'avenir de l'aspiration démocratique, cent ans après l'adoption de la loi de 1901, il permet de faire la part du souhaitable, du possible et de l'effectif.
C'est à une véritable initiation à l'évolution de l'humanité que nous convient ces "chroniques préhistoriques". Le spécialiste y trouvera les grandes étapes des découvertes contemporaines et le non-initié aura le plaisir de... découvrir celles-ci.
Nom : Australopithecus afarensis ; prénom : Lucy ; âge : environ 20 ans ; taille : 1,20 m ; domicile : Hadar (dans l'Afar, nord-est de l'Éthipie) ; ancienneté : environ trois millions d'années. La découverte, en 1974, de 40% du squelette de Lucy, le plus primitif des Australopithèques et le premier Hominidé connu à se tenir debout ; celle, en 1959, en Tanzanie, d'Homo habilis, le premier Hominidé à mériter le classement dans le genre Homo ; celle, en 1984, au Kenya, d'un Homo erectus quasi complet ayant vécu il y a 1,6 million d'années, confirment l'idée que le berceau de l'humanité se trouve bien en Afrique orientale. C'est l'histoire très ancienne de l'Homme que retrace Yvonne Rebeyrol au fil de vingt-cinq ans de découvertes paléontologiques et d'études préhistoriques. Issu d'un ancêtre commun à lui-même et aux singes anthropoïdes d'Afrique (chimpanzé et gorille), l'Homme est devenu en quelqes millions d'années un être exceptionnel. Certes, il ressemble encore à ses cousins par des caractères physiques et biologiques, mais il est un Primate unique par le volume de son encéphale, la station debout, la prématurité de ses nouveaux-nés, la conscience et le langage articulé. Présentant les travaux d'André Leroi-Gourban, de Louis Leakey, de Phillip Tobias, d'Yves Coppens, d'Henry de Lumley et de bien d'autres spécialistes, l'auteur nous fait partager leurs convictions et leurs hésitations, leurs hypothèses et leurs espérances. Nous visitons des sites archéologiques en France ou aux États-Unis. Nous assistons à la découverte des outils et de l'art. C'est à une véritable initiation à l'évolution de l'humanité que nous convient ces "chroniques préhistoriques". Le spécialiste y trouvera les grandes étapes des découvertes contemporaines et le non-initié aura le plaisir de... découvrir celles-ci.
Plus les sciences et les techniques apportent des solutions raisonnées aux problèmes humains, et plus semble grandir l'angoisse de l'incontrôlable, qu'elle concerne les atteintes à l'environnement ou les risques des manipulations génétiques : chaque avancée du savoir paraît exiger une rançon de peur. Pourquoi ces liens étranges entre raison pratique et motif d'émotion ou d'inquiétude ?
Plus les sciences et les techniques apportent des solutions raisonnées aux problèmes humains, et plus semble grandir l'angoisse de l'incontrôlable, qu'elle concerne les atteintes à l'environnement ou les risques des manipulations génétiques : chaque avancée du savoir paraît exiger une rançon de peur. Pourquoi ces liens étranges entre raison pratique et motif d'émotion ou d'inquiétude ? Pourquoi, en même temps, ces décalages entre la réalité des risques ou la tendance à les percevoir de façon dramatisée ou au contraite à les négliger ? La volonté de maîtrise scientifique n'entretient-elle pas avec l'irrationnel une relation beaucoup plus étroite qu'on a pu le dire ? Pour répondre à ces questions, Denis Duclos a enquêté auprès des spécialistes de la science et des dangers : techniciens, savants, journalistes, industriels, syndicalistes, écologistes. Et il montre dans ce livre nourri d'exemples passionnants que tous ont tendance à opposer fiabilité technique et faillibilité humaine, à séparer vérité matérielle et engagement éthique, à couper la professionnalité de l'appartenance civile. C'est dans cette dissociation, au coeur même du processus d'élaboration de la science et des techniques, que se reproduit l'oscillation caractéristique de la modernité entre croyance et savoir. L'auteur utilise ainsi le rapport des acteurs sociaux au péril technologique comme un instrument sociologique inédit, révélateur du fonctionnement symbolique de notre culture et de ses tensions face au progrès. Son livre s'adresse aussi bien aux techniciens et aux ingénieurs qui réfléchissent sur le sens de leurs activités, qu'au plus large public intéressé à l'évaluation des choix scientifiques et techniques par la société.
La vie d'un communiste cabochard ou les aventures de Codou : communiste, objecteur de conscience, interné chez les fous, héros de Saint-Tropez contre la municipalité véreuse, morphinomane malgré lui, volontaire en Espagne, déporté dans les camps d'Algérie, responsable aux faux papiers pour le PCF, employé dans les ministères communistes et, enfin, versé dans l'import-export avec les pays de l'Est... À chaque fois, il empêche de danser en rond, fourre son nez où il ne faut pas, et n'en fait qu'à sa tête. La vie d'un communiste cabochard ou le Parti vu d'en bas : il croit au Parti tant qu'il peut, mais il note scrupuleusement tout ce qui le choque dans l'attitude des dirigeants qu'il côtoie. Il ne plaque pas la théorie sur le réel : il donne à voir Marty, Tillon, Rol-Tanguy, Garaudy, et même le mystérieux Jean Jérôme. Comme ils lui sont apparus, en bien ou en mal. De même pour les pays de l'Est : il ne disserte pas sur le socialisme réel, mais il se trouve à Budapest et à Varsovie en 1956 et il va partout, les yeux grands ouverts. Et quand il revient à Paris, il quitte le PC. La vie d'un communiste cabochard ou la honte. Honte aux dirigeants qui n'ont pas su être dignes de leurs militants, qui n'ont pas eu le goût du sacrifice, de l'honneur, ou simplement de la vérité. Honte aux petites magouilles et aux grandes trahisons.
Récits vivants, parfois touchants, toujours riches en péripéties, ces témoignages d'antifascistes allemands contraints de fuir le Reich hitlérien après 1933, ne laisseront aucun lecteur indifférent. L'ensemble éclaire aussi les rapports entre la population française et ces étrangers que les uns continuent alors à traiter d'indésirables, voire de boches, et auxquels d'autres, à gauche, apportent leur aide et leur amitié. Car c'est un regard neuf, et souvent fort perspicace, que ces exilés jettent sur la France de l'affaire Stavisky, du Front populaire, de la guerre, de l'Occupation. En racontant leurs tribulations quotidiennes, les oubliés de l'histoire nous font mieux comprendre certains aspects de notre propre histoire.
"Ce que le parti attend de la direction, c'est qu'elle surmonte, si elle est en état de prendre conscience de cette nécessité vitale, sa surdité et son isolement, qu'elle se mette à l'écoute de l'appel qui monte de ses militants et des masses, et qu'elle s'engage résolument dans une véritable analyse marxiste de ses pratiques politique et organisationnelle.
Comment ne pas penser ici irrésistiblement à la campagne d'analyse et de critique à laquelle reste attaché le nom de M. Thorez, qui permit au P.C.F. de surmonter une grave crise et de mobiliser les masses populaires dans un grand mouvement historique : « Pas de mannequins dans le parti ! Que les bouches s'ouvrent ! »"