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DOMINIQUE GOY-BLANQUET
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Ce roman commence par un cri. Ce cri, interminable, est celui que lance Ada, adolescente de 16 ans, en plein cours d'histoire dans un lycée londonien. Ce roman se termine par un rêve, celui d'une renaissance. Entre les deux a lieu la rencontre du Grec Kostas Kazantzakis et d'une jeune fille turque, Defne, en 1974, dans une Chypre déchirée par la guerre civile. De sa prose puissante, Elif Shafak nous conte l'histoire d'un amour interdit dans un climat de haine et de violence qui balaie tout sur son passage - avec l'espoir, tout de même, de libérer la parole des générations précédentes.
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Les ravissements
Jan Carson
- Sabine Wespieser Éditeur
- Litterature Etrangere
- 5 Janvier 2023
- 9782848054681
Dans sa classe de onze enfants, Hannah se sent exclue de tout : ses parents, fondamentalistes protestants, ne l'autorisent à se rendre ni au cinéma, ni aux fêtes d'anniversaire et pas non plus à la sortie de fin d'année. Ce 25 juin 1993 est le dernier jour d'école et, malgré les Troubles qui semblent ne jamais vouloir finir, tous rêvent d'un été insouciant.
Mais une inquiétude d'une autre espèce s'installe à Ballylack, localité imaginaire d'Irlande du Nord qui n'est pas sans rappeler Ballymena, où est née l'auteure : Ross, un condisciple d'Hannah, meurt d'un mal inconnu et mystérieux, bientôt suivi par Kathleen. Parce que les deux premières victimes étaient de faible constitution, la communauté tente de se rassurer. Mais, quand les camarades d'Hannah disparaissent les uns après les autres, la panique s'installe. Ballylack est envahie par des équipes scientifiques chargées de découvrir l'origine de cette épidémie ne frappant que les enfants, devenue une affaire nationale. Et, bien sûr, des hordes de journalistes leur emboîtent le pas.
Hannah n'est atteinte d'aucun symptôme. Mais elle vit une expérience qu'il lui est impossible de confier à quiconque : un à un, les fantômes de ses amis viennent la hanter.
Si Jan Carson, grande amatrice de réalisme magique, embarque son lecteur dans des situations où tout peut arriver, c'est avec une scrupuleuse précision et une ironie mordante qu'elle scrute les effets de la crise sur les habitants du bourg. Maîtresse dans l'art du récit, elle met à nu ses personnages, notamment les parents des petites victimes, dont elle construit des portraits formidables de véracité et d'énergie. -
Le Fantôme de la banquette arrière
Jan Carson
- Sabine Wespieser Éditeur
- Litterature Etrangere
- 19 Septembre 2024
- 9782848055381
Ancrées dans l'Irlande du Nord où vit leur autrice, les seize nouvelles de ce formidable recueil ont la double qualité de nous inviter à arpenter avec elle ce territoire dont elle ne cesse d'explorer les complexités et aussi de nous proposer comme un concentré de sa vision du monde, de son monde.
Chez Jan Carson, tout est question de point de vue : on ne peut qu'épouser celui de la narratrice du premier récit, indignée, après sa longue et habituelle baignade, de découvrir sur « sa » plage d'ordinaire déserte un couple envahissant flanqué d'un affreux bébé mangeur de sable ; rien d'anormal non plus à ce que la jeune Ruth converse avec le fumeur invétéré installé sur la banquette arrière d'une voiture que son grand-père vient d'acheter, même si l'on apprend qu'il s'agit du propriétaire d'origine, aujourd'hui décédé ; et, bien sûr, on compatit avec le père londonien qui, après de vaines recherches, est bien forcé de constater que ses deux gamins turbulents ne reparaîtront pas à l'extrémité du toboggan où ils se sont engouffrés : il le savait bien, qu'il n'aurait pas dû accepter qu'ils viennent s'installer à Belfast.
Férocement drôles, impeccablement construites - dans la pure tradition d'efficacité des nouvelles anglo-saxonnes -, les textes de Jan Carson déclinent avec brio ce que les lecteurs de ses romans connaissent bien : un réalisme cru conjugué à la capacité de convoquer le surnaturel comme un élément parfaitement intégré au quotidien. C'est bien le cas avec le « fantôme de la banquette arrière » : la nouvelle titre du recueil prend en effet un tour politique dès qu'il s'avère que le passager clandestin de cette famille protestante est catholique.
De même que la mémoire des Troubles - qui ont déchiré le pays pendant des années -n'est jamais loin, la talentueuse écrivaine propose ici une véritable et passionnante cartographie de sa terre natale, nous traçant le portrait lucide et parfois mélancolique d'un monde où tout ou presque peut arriver. -
10 minutes et 38 secondes dans ce monde étrange
Elif Shafak
- Flammarion
- Litterature Etrangere Flammarion
- 8 Janvier 2020
- 9782081500419
Et si notre esprit fonctionnait encore quelques instants après notre mort biologique ? 10 minutes et 38 secondes exactement. C'est ce qui arrive à Tequila Leila, prostituée brutalement assassinée dans une rue d'Istanbul. Du fond de la benne à ordures dans laquelle on l'a jetée, elle entreprend alors un voyage vertigineux au gré de ses souvenirs, d'Anatolie jusqu'aux quartiers les plus mal famés de la ville.
En retraçant le parcours de cette jeune fille de bonne famille dont le destin a basculé, Elif Shafak nous raconte aussi l'histoire de nombre de femmes dans la Turquie d'aujourd'hui. À l'affût des silences pour mieux redonner la parole aux « sans-voix », la romancière excelle une nouvelle fois dans le portrait de ces « indésirables », relégués aux marges de la société.
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Peri est mariée à un riche promoteur. Au cours d'un grand dîner dans une somptueuse villa du Bosphore, chacun commente les événements dramatiques que vit la Turquie. Peri, elle, se remémore sa jeunesse, les affrontements entre son père laïc et sa mère très pieuse, puis entre ses deux amies lorsqu'elle était étudiante à Oxford : Shirin, Iranienne émancipée, et Mona, musulmane pratiquante et féministe. Elle repense aussi à Azur, le flamboyant professeur de philosophie qui les a réunies.Au fil des souvenirs, cette soirée fera surgir les impasses dans lesquelles se débat la société turque, coincée entre tradition et modernité.
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L'architecte du sultan
Elif Shafak
- Flammarion
- Litterature Etrangere Flammarion
- 22 Avril 2015
- 9782081353770
Istanbul, XVIe siècle. Le jeune Jahan, arrivé clandestinement, évolue dans la ville en compagnie d'un éléphant blanc destiné à être offert au sultan Suleiman le Magnifique. Il rencontre des courtisans, des gitans, des dompteurs, mais aussi la belle Mihrimah. Un jour, il attire l'attention de Sinan, l'architecte du roi.
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Les lanceurs de feu
Jan Carson
- Sabine Wespieser Éditeur
- Litterature Etrangere
- 9 Septembre 2021
- 9782848054155
À Belfast, l'été 2014 restera dans les mémoires comme celui des Grands Feux. Bien avant les feux de joie traditionnellement élevés à l'occasion de la grande parade orangiste du 12 juillet, de gigantesques foyers illuminent la ville cette année-là, malgré l'interdiction formelle des autorités. Jusqu'à la fin des Troubles, en 1998, le Douze donnait régulièrement lieu à des affrontements entre nationalistes catholiques et loyalistes protestants. Aujourd'hui encore, la violence n'est jamais loin :
« Les Troubles sont terminés, maintenant. C'est ce qu'on nous a dit dans les journaux et à la télévision. Ici nous sommes très portés sur la religion. Nous avons besoin de tout croire par nous-mêmes. (On a tous tendance à enfoncer les doigts dans la plaie et bien fouiller autour.) Nous ne l'avons pas cru dans les journaux ni à la télévision. Nous ne l'avons pas cru dans nos os. Après tant d'années assis sur une position, nos épines dorsales s'étaient figées. Il nous faudra des siècles pour les déplier », écrit Jan Carson avec l'acuité et l'humour qui caractérisent son regard sur sa ville natale.
Mené tambour battant, son roman met en parallèle le quotidien de deux pères de famille, l'un et l'autre rongés par l'angoisse pendant les trois mois de cet été particulier.
Le premier, Jonathan Murray, est médecin. Lors d'une nuit de garde, il répond à l'appel d'une femme à la voix si enchanteresse qu'il lie son sort au sien. Ensemble, ils ont un enfant que sa fascinante génitrice abandonne dès sa naissance. Depuis lors, Jonathan l'élève seul, oscillant entre le ravissement et la terreur de découvrir sur le petit visage inoffensif le moindre signe de ressemblance avec sa mère...
Le second père, Sammy Agnew, ancien paramilitaire loyaliste, n'a qu'une peur : avoir transmis à son fils ses propres pulsions de violence.
Or, depuis quelques jours, circule une vidéo sur laquelle un « Lanceur de feu » se filme avec des pancartes incitant à propager les incendies : derrière la silhouette en survêtement noir surmontée d'un masque à l'effigie de Guy Fawkes, symbole de protestation, Sammy croit distinguer son garçon taciturne, qui vit comme une ombre à l'étage de la maison familiale.
Dans la chaleur de l'été, alors que la panique gagne et que Belfast s'embrase, ces pères, sans rien en commun sinon leur impuissance face à la violence qu'ils craignent d'avoir engendrée, finissent par se rencontrer...
Leurs errances apparaissent comme la métaphore de cette ville où protestants et catholiques, flics et manifestants, pauvres et riches se frôlent sans se connaître, et dont Jan Carson dresse un époustouflant portrait. Son réalisme fait merveille pour embarquer le lecteur dans des situations où tout peut arriver... même croiser des enfants dotés de pouvoirs spéciaux. Comme le dit Sammy à Jonathan, il suffit d'aller voir ce qui se passe de l'autre côté de la rue.
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Le nouveau roman de Fiona Kidman s'ouvre en octobre 1955, le premier jour du procès d'Albert Black à la Cour suprême d'Auckland : arrivé en Nouvelle-Zélande deux ans auparavant, ce jeune Irlandais du Nord, âgé de vingt ans à peine, est accusé du meurtre d'un garçon également immigré de fraîche date, à l'occasion d'une rixe dans un bar. Moins de cinq mois plus tard, il sera pendu, devenant ainsi l'avant-dernier condamné à mort du pays.
S'inspirant de ce fait divers tragique, qui bouleversa le pays, Fiona Kidman s'interroge sur ce qui s'est réellement passé : remontant le fil des événements, elle enquête sur les circonstances du drame - crime passionnel ? légitime défense ? - mais aussi sur la personnalité d'Albert « Paddy » Black, gentil gamin jouant aux billes sur Sandy Row et dont la mère n'a que des souvenirs heureux, mais que les circonstances économiques ont chassé de Belfast dans l'espoir d'une vie meilleure.
Avec son copain Peter, rencontré sur le bateau, il posait des câbles pour le ministère des Postes et Télégraphes dans la vallée de la Hutt. Fatigués de vivre dans des cabanes rudimentaires, tous deux convainquent Rose, une jeune veuve vivant seule avec ses enfants, de les prendre en pension. Paddy trouve là un deuxième foyer, mais parce qu'il aime s'amuser, aller au bal et séduire les filles, il finit par tenter sa chance à Auckland, où les chantiers embauchent.
Fiona Kidman met en lumière avec beaucoup de finesse le contexte de l'époque : la peine de mort venait d'être rétablie, et le Premier ministre de publier un rapport sur les moeurs adolescentes dans le pays. Or la vallée de la Hutt passait pour l'endroit où le vice avait pris naissance... notamment à cause de l'arrivée de nombreux étrangers.
C'est peu dire que la généreuse Rose fut l'objet de commérages pour avoir accueilli chez elle deux d'entre eux.
Le roman, qui conjugue retours vers le passé, scènes du procès et évocations du quotidien de Paddy dans sa cellule, donne le sentiment poignant, et cela dès les premiers chapitres, que le sort de l'accusé est déjà scellé : le procureur général, comme la plupart des jurés, semble l'avoir condamné avant même que tombe le verdict, rendant impossible toute velléité de lui offrir les moyens de se défendre. Sa propre mère, qui avait pourtant désespérément entrepris de réunir l'argent du voyage, s'était vu fermement signifier que ce serait en vain.
Même si le directeur de la prison lui montre un peu de compassion, Paddy comprend au fil des jours l'étendue de sa solitude dans ce pays où il s'était rêvé un avenir. Ce sont pourtant sa bonté, son calme et son humour qui irradient dans les pages que lui consacre Fiona Kidman.
Ses dernières paroles - « Je vous souhaite un joyeux Noël, messieurs, et une Nouvelle Année prospère » - en sont la trace douce-amère.
Ce livre saisissant résonne de manière particulièrement contemporaine : il met en effet en cause, à travers un fait survenu dans les années cinquante, les mécanismes, devenus hélas si familiers, à l'oeuvre dans le rejet de l'autre.
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« Fiona Kidman met en lumière la force des femmes, même niées dans leur liberté à disposer d'elles-mêmes. » ELLE
Aux yeux de tous, Maria est une sorcière. La sorcière de Waipu. Bannie par les siens pour s'être rebellée et avoir vécu sa passion avec un cantonnier, elle a trouvé refuge dans la maison de sa naissance où elle vit en recluse depuis plus de cinquante ans. Parmi les vestiges du passé, elle découvre un jour le journal de sa grand-mère : le livre des secrets. Comme elle, Isabella était aventureuse, indocile. Comme elle, pour exister dans une communauté masculine, elle a choisi la résistance.
Fiona Kidman, née en 1940, vit à Wellington. Elle a été journaliste, productrice pour la radio, auteure de scénarios pour le cinéma et la télévision, avant de se consacrer à la littérature. Elle est aujourd'hui considérée en Nouvelle-Zélande comme un écrivain de tout premier plan. -
Jeune veuve de guerre, Irene Sandle quitte Wellington en 1952 avec sa petite fille, Jessie, pour travailler dans les champs de tabac. Mais le nouveau départ tourne au cauchemar quand elle épouse l'inquiétant gérant de l'exploitation, Jock Pawson, une décision tragique qui pèsera sur toute sa descendance.
Dans cette éblouissante saga, les femmes, fortes et attachantes, menant de front combats intimes et politiques, donnent matière à d'inoubliables portraits.
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Enfant, juchée sur sa balançoire, elle voulait déjà s'envoler plus haut. Promise à un destin de pianiste, Jean Batten ne rêve que d'avions. Avec l'aide de sa mère, elle prend des leçons de pilotage en cachette et devient une aviatrice célèbre dans les années 1930. Surnommée la « Garbo des airs », téméraire et infatigable, elle enchaîne les records. D'Angleterre en Australie, de la gloire à l'oubli...
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Ce regard en arrière et autres récits journalistiques
Nuala O'faolain
- Le Livre De Poche
- 9 Septembre 2020
- 9782253934394
Nuala O'Faolain, dont on connaît surtout en France les romans et Mémoires, a d'abord été une grande journaliste et éditorialiste. Dans cette sélection de soixante-dix textes qui englobent plus de vingt ans de carrière (de 1986 à 2008), se retrouvent tout entiers l'intelligence pointue, la sensibilité, la faculté d'empathie et le talent d'observation de la grande dame irlandaise.
Traitant des sujets les plus divers - le statut des femmes, le processus de paix en Irlande, le boom économique, l'omniprésence de l'Église catholique, les effets du 11 Septembre à New York et dans le monde, les concerts de U2 ou la mort de sa chienne Molly -, Nuala O'Faolain ne baisse jamais la garde : elle ne cesse de dénoncer, avec la précision teintée d'ironie qui lui était propre, les mécanismes intimes du pouvoir et de l'impuissance. Dans des articles où paraît sa lucidité et sa tendresse pour le monde, on découvre l'étendue des centres d'intérêt et la richesse de la palette narrative de celle qui contribua beaucoup au combat féministe en Irlande et fut une grande conscience de son époque.
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La nuit du papillon d'or
Tariq Ali
- Sabine Wespieser Éditeur
- Litterature Etrangere
- 6 Octobre 2011
- 9782848051031
De beau matin, le téléphone sonne chez Dara, le narrateur, écrivain installé à Londres : son ami de jeunesse, à qui il confiait ses espérances politiques mais aussi ses secrets d'alcôve, le tire du sommeil pour lui rappeler une vieille dette d'honneur. Plus de quarante ans se sont écoulés depuis leurs années soixante à Lahore, et Platon, devenu un peintre célèbre et controversé, veut que Dara écrive sa vie.
Dara tire aussitôt prétexte de cette biographie de commande pour partir sur les traces de ses condisciples d'alors, avec qui il militait clandestinement. Dispersés à travers le monde, ils ont empruntées des voies fort divergentes. Mais tous -le chirurgien républicain comme le combattant maoïste - vont finir par se retrouver au pays natal pour le dévoilement du grand oeuvre de Platon : une toile gigantesque intitulée « Les Quatre Cancers de Terrepatrie » - l'Amérique, les militaires, les mollahs et la corruption.
Car il est question, dans ce roman résolument contemporain, du Pakistan d'aujourd'hui (jamais nommé), dont Tariq Ali brosse un portrait dévastateur, mais pour des raisons qui ne sont pas forcément celles qu'invoque le discours occidental. Témoin la pseudo-victime de l'islam devenue la coqueluche des médias français que met en scène l'écrivain.
Si le regard de Tariq Ali est acéré, celui-ci reste un formidable conteur. Quand il dénonce le féodalisme, c'est à travers le personnage de la belle Zaynab, la compagne de Platon, qui jeune fille a été mariée au Coran. pour éviter que le patrimoine familial ne soit dilapidé. Et l'histoire d'amour de Dara avec Jindié, le « Papillon d'or » du titre, tient le lecteur en haleine tout au long du roman.
On retrouve bien, dans cet éblouissant cinquième volet du Quintet de l'islam, Tariq Ali tel qu'en lui-même : drôle, imaginatif, intelligent, satirique et diablement informé.
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La violente agression que subit dans sa salle de bains de La Esmeralda, Mexique, un inconnu vêtu d'un tee-shirt Redskins - c'est la scène inaugurale du livre - n'a pas de lien apparent avec le road movie mélancolique qui conduit Dale et Hoa dans le désert de Chihuahua.
Dale fait des recherches sur Ambrose Bierce, l'écrivain mort mystérieusement en 1913 après avoir rejoint la Révolution mexicaine. C'est sur sa trace qu'il emmène sa femme, Hoa. Le silence de leur fils les plonge tous deux dans un profond désarroi. L'angoisse les étouffe dans le huis clos de l'habitacle, les heures s'égrènent, à peine rythmées par quelques arrêts dans des lieux désolés. Tout va de mal en pis quand leur voiture tombe en panne.
En parallèle de leur expédition, l'agresseur du début, remonté dans son pick-up Dodge après avoir fait un macabre usage du tee-shirt Redskins, convoie son butin depuis une grotte - celle où Dale a trouvé refuge.
Égarés au coeur du domaine des narcotrafiquants, ni Dale ni Hoa ne parviennent à déchiffrer les événements dont ils sont les témoins, encore moins à mesurer le danger qu'ils courent.
Ce western tragique - et la magnifique histoire d'amour qu'il révèle - puise sa source dans la sombre beauté du territoire où il est ancré : âpre, implacable, minéral et admirablement évoqué par un poète géologue qui incarne le désert comme le personnage essentiel de son roman.
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New Dehli, 1984. Après l'assassinat d'Indira Gandhi, un climat d'angoisse pèse sur la vile. Chhobi, une jeune fille qu'occupent essentiellement ses projets professionnels tente de veiller sur sa jeune soeur Sonali, aussi ravissante qu'impulsive. Leur mère, veuve, se bat avec courage contre la solitude et la difficulté des temps. Dadu le grand-père, muré dans la nostalgie de ses terres perdues depuis la Partition, n'est plus d'aucun soutien. Seule la présence lumineuse de Dida, la grand-mère, cuisinière émérite et protectrice du foyer, adoucit la vie quotidienne de cette lignée de femmes. L'arrivée de Sonny, un fils de famille, dans la vie de Sonali va perturber l'équilibre précaire de la maisonnée... Après la mousson est un livre flamboyant, profondément ancré dans la réalité indienne: la langue ciselée de l'auteur restitue à merveille la saveur des mets, les couleurs des étoffes et le chatoiement de la cité.
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Les nouvelles de Fiona Kidman sont denses, efficaces, pétries d'intelligence humaine. Puisant son inspiration dans la réalité de la Nouvelle-Zélande où elle vit, Fiona Kidman évoque avec la simplicité et le naturel que lui donne sa remarquable maîtrise de l'écriture le destin d'êtres ordinaires. Qu'elle évoque les couples qui se forment, les vies refaites, les rendez-vous amoureux, le sexe au bureau, les mariages arrangés ou les avortements en Australie (interdits en Nouvelle-Zélande), elle parvient immanquablement à suggérer la complexité sous les apparences.
Au point d'entretenir, au fil des trois nouvelles centrales de ce recueil, le mystère de la disparition d'une jeune femme contrainte d'épouser un fermier du Nord en mal de main d'oeuvre. La cocasserie affleure parfois, comme dans Préservation, où il est question d'une robe empruntée pour une circonstance très particulière et restituée avec une étrange odeur de formol. Ces onze textes, impeccablement construits dans la plus belle tradition du genre, révèlent aux lecteurs français une nouvelliste chevronnée.
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Géomètre et poète à Eureka Springs, Lester exerce sur son entourage une véritable fascination. Dans ce roman aussi bref qu'envoûtant, Forrest Gander tente de percer à jour le mystère de la courte trajectoire de son personnage. Sa naissance, âpre et violente mise au monde, laisse augurer le drame dont il sera le protagoniste. Son collègue Clay, sur les chantiers qu'ensemble ils arpentent, vit dans l'ombre de ce compagnon imprévisible et désinvolte. Séducteur impénitent, le beau Les' vit entre sa femme et sa maîtresse, Sarah. Spectateur éperdu, fasciné et impuissant de cette relation triangulaire, Clay va y mettre une fin brutale faute de parvenir à s'y immiscer. Le suicide de Lester inspire à Sarah une déchirante élégie à la mémoire de cet homme qu'elle n'a pu s'empêcher d'aimer. Se remémorant ses élans, ses passions et ses fulgurances, mais aussi ses comportements paradoxaux, elle tente désespérément de percer à jour le secret de celui qu'elle a côtoyé de si près sans bien parvenir à le connaître. Au fil de ce portrait syncopé, apparaît l'image d'un mauvais garçon, fasciné par Villon, épris d'absolu, dont la trajectoire s'interrompt comme une phrase musicale inachevée. Forrest Gander a su, avec une remarquable économie de moyens, dire les frontières ténues entre l'amitié, l'amour et la mort, donnant à un fait divers somme toute banal une étonnante intensité tragique.
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Ce regard en arrière ; et autres écrits journalistiques
Nuala O'faolain
- Sabine Wespieser Éditeur
- Litterature Etrangere
- 3 Février 2011
- 9782848050935
Nuala O'Faolain, avant de devenir l'écrivain qu'on connaît, a d'abord été une grande journaliste. Et c'est grâce à son métier de journaliste qu'elle a été amenée à écrire son premier livre, On s'est déjà vu quelque part ?, paru en France en 2002 : un éditeur irlandais avait eu l'idée de lui demander de rassembler ses chroniques, parues dans le Irish Times. Nuala avait accepté, à la condition de pouvoir écrire en préface un récit autobiographique. Les chroniques ont bien paru, à Dublin en 1996, avec ladite préface, en fait un essai de plus de trois cents pages. Très vite réédité sans les chroniques, le récit, sous-titré Les Mémoires accidentels d'une femme de Dublin, a remporté en Irlande puis aux États-Unis un succès phénoménal.
Alors que le public irlandais garde vive la mémoire des chroniques, des articles et des émissions de Nuala O'Faolain, féministe de la première heure, spectatrice attentive et fine analyste du monde qui l'entourait, les lecteurs français ne connaissent " que " ses romans et ses mémoires. Ses écrits journalistiques n'avaient pas encore été traduits. Dans la sélection publiée aujourd'hui, englobant plus de vingt années de carrière - de 1986 à 2008 -, se retrouvent tout entiers la sensibilité, la faculté d'empathie et le talent d'observation de la grande dame irlandaise disparue.
Traitant des sujets les plus divers - des plus politiques comme le processus de paix en Irlande aux plus futiles, comme les travaux ménagers, en passant par U2, Sinatra, le matérialisme ou la condition féminine -, Nuala O'Faolain ne baisse jamais la garde : elle ne cesse de dénoncer, avec la précision teintée d'ironie qui lui était propre, les mécanismes intimes du pouvoir et de l'impuissance. Ceux qui ont lu ses romans auront l'émouvant sentiment de la retrouver telle qu'en elle-même dans sa lucidité et sa tendresse pour le monde. Ils découvriront l'étendue des centres d'intérêt et la richesse de la palette narrative de celle qui fut aussi un grand témoin et une grande conscience de son époque.
Née à Dublin en 1940, Nuala O'Faolain, après une enfance difficile et bohème, au milieu d'une fratrie de neuf, entre un père absent, brillant journaliste hantant les nuits de Dublin, et une mère romantique et désespérée qui se réfugiait dans l'alcool, est devenue productrice de télévision puis journaliste, à Londres d'abord pour la BBC, et à Dublin.
On s'est déjà vu quelque part ?, par son succès - aux États-Unis, il a souvent été cité comme le pendant féminin (et féministe) des Cendres d'Angela de Frank McCourt - et le phénomène d'identification qu'il a généré auprès de toute une génération de femmes, a changé sa vie, qu'elle a à partir de ce moment consacrée à l'écriture littéraire tout en restant journaliste.
Vivant entre New-York et l'Irlande, elle a publié en 2001, aux États-Unis, un roman, My Dream of You (Chimères, 2003), très favorablement accueilli aussi, puis est revenue au genre autobiographique avec Almost There en 2003 (J'y suis presque, 2005).
En 2005 paraissait The Story of Chicago May, roman biographique d'une jeune Irlandaise pauvre qui, en 1890, s'est enfuie de chez elle pour devenir une criminelle célèbre aux États-Unis. Traduit en français sous le titre L'Histoire de Chicago May, ce livre a obtenu le Prix Femina étranger en 2006.
Son dernier roman, Best Love Rosie, a paru en août 2008, trois mois après la mort de son auteur, le 9 mai 2008 à Dublin. Nuala 0'Faolain disait souvent que ses romans révélaient plus d'elle-même que ses autobiographies : Rosie, l'héroïne du livre, incarne toutes les questions qui traversent l'oeuvre de l'écrivain, et Best Love Rosie est un livre lumineux et apaisé sur la question de l'âge, de la solitude, de l'exil, du sentiment maternel et des chimères de l'amour.
Toute l'oeuvre de Nuala O'Faolain est publiée en France par Sabine Wespieser éditeur, à qui elle a confié la gestion de ses droits.
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Quiddités ; dictionnaire philosophique par intermittence
W. V. Quine
- Seuil
- L'ordre Philosophique
- 30 Septembre 1992
- 9782020128353
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C'est à New York, alors qu'elle travaille comme serveuse au Night Birds, que Suzanne rencontre Jean-Michel.
A part ses lèvres rouges, elle a l'air d'un garçon, d'un cireur de chaussures à grande casquette noire. Il sent le cuir, la peinture à l'huile, la marijuana et ne marche jamais en ligne droite. Jean-Michel, c'est Basquiat, un des premiers artistes graffeurs, et aussi l'un des seuls Noirs à percer dans un milieu exclusivement blanc. Suzanne, qui devient sa muse et sa compagne, raconte sans détour à Jennifer les heures de gloire succédant aux débuts difficiles, les rencontres avec les célébrités underground du Manhattan des années quatre-vingt, de Warhol à Madonna, mais aussi le cauchemar de la dépendance et la folie d'une sexualité multi-chromatique.
Plus que la biographie d'un amour inattendu, En compagnie de Basquiat s'apparente à un journal où se bousculent, comme des vagues déferlantes, une suite de scènes rapides, de souvenirs, d'états d'âme, de collages. Par cette écriture qui rappelle l'art de Basquiat. Jennifer Clement nous entraîne au coeur du processus de création, en brossant le portrait à vif d'une passion dévastatrice.
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L'homme qui était Sherlock Holmes ; une biographie du Docteur Joe Bell
Ely m. Liebow
- Baker Street
- 26 Novembre 2009
- 9782917559093
« C'est à vous que je dois Sherlock Holmes » écrit Arthur Conan Doyle à son ancien professeur et mentor, le Docteur Joseph Bell, en 1892.Cet éminent chirurgien et professeur de médecine à l'Université d'Edimbourg est le père de la fameuse « Méthode déductive » qui sera la marque de fabrique de Sherlock Holmes, ainsi que l'essence de son mystère.Outre son imposante oeuvre médicale, Joseph Bell était en effet réputé pour ses fabuleux pouvoirs d'observation et de déduction. A l'instar de son illustre héritier de fiction, il avait la capacité de tirer à partir de détails mineurs sinon insignifiants des informations capitales quant à la maladie de ses patients. ou à la résolution d'affaires criminelles.La notoriété de ses dons poussa en effet Scotland Yard à faire appel à ses services et le Docteur Joe Bell devint l'un des premiers experts médicaux-légaux. Il s'illustra ainsi dans la traque du tristement célèbre Jack l'éventreur, en concourant peut-être à l'arrêt soudain des atroces forfaits du premier tueur en série.Fort d'une recherche approfondie de la vie de Joseph Bell et des nombreuses correspondances entre ce dernier et Conan Doyle, Ely Liebow relate avec brio l'existence de cet homme remarquable à la postérité exceptionnelle.Cette biographie de référence nous permet de suivre le créateur original du légendaire « Elémentaire » dans l'effervescence intellectuelle, politique et sociale d'Edimbourg au tournant du siècle où l'on croise Charles Dickens, Robert Louis Stevenson, Charles Darwin ou encore le fondateur du scoutisme, Robert Baden-Powell.