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Coffret
120 fiches fragments Kafka en bilingue
2 séries de dessins de Marc-Antoine Mathieu -
L'expérience esthétique : Dialogue avec Bernard Aspe
Jacques Rancière
- Nous
- 15 Janvier 2025
- 9782370841469
A venir
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M'y voilà enfin ! Toute ma froideur s'est évanouie.
Je suis accablé, persécuté par ce que j'ai vu ; j'ai vu, je crois, ce que personne n'a vu, ce qu'aucun voyageur n'a peint [ ]. Je n'ai pas quitté la villa Adriana sans remplir d'abord mes poches de petits fragments de porphyre, d'albâtre, de vert antique, de morceaux de stuc peint, et de mosaïque, ensuite j'ai tout jeté. Elles ne sont déjà plus pour moi ces ruines, puisqu'il est probable que rien ne m'y ramènera.
On meurt à chaque moment pour un temps, une chose, une personne, qu'on ne reverra jamais : la vie est une mort successive.
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Ce que j'ai vu, entendu, appris...
Giorgio Agamben
- Nous
- Antiphilosophique Collection
- 4 Octobre 2024
- 9782370841414
A venir
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Fruits d'une collaboration entre écrivains de l'Oulipo, urbanistes, climatologues et diplomates, les textes, écrits sous la forme d'une fiction s'inspirant de la structure de l'oeuvre Les villes invisibles d'Italo Calvino, s'intéressent aux problématiques liées à la ville au XXIe siècle et dans les années à venir. Des rapports scientifiques et des textes de référence complètent l'ensemble.
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A venir
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« L'été s'abat sur la Sicile comme un faucon jaune sur l'étendue jaune des terres couvertes de chaumes. La lumière se multiplie dans une explosion continue, elle semble ouvrir, révéler les formes étranges des monts et rendre très durs, compacts, le ciel, la terre et la mer, mur ininterrompu de métal coloré. Sous le poids infini de cette lumière, hommes et animaux se déplacent en silence, acteurs d'un drame ancien dont le texte ne parvient pas à nos oreilles : mais leurs gestes suspendus dans l'air radieux sont comme des voix changeantes et pétrifiées, comme des troncs de figuiers de Barbarie, des branches tortes d'olivier, des pierres monstrueuses, de noires cavernes sans fond. »
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Recueil de 25 nouvelles et chroniques inédites, Le Feu dans la mer a été publié en Italie en 2010. Il couvre la période allant de 1947, celle des débuts de l'écrivain (Sciascia publie son premier livre en 1950), à 1975. Le feu dans la mer compose un portrait à facettes de la Sicile et de ses habitants, de l'épopée garibaldienne au vingtième siècle, plein d'intelligence ironique, d'humour et de justesse critique.
Ces textes narratifs et ces chroniques portent sur divers aspects de la Sicile : sur le monde rural, que Sciascia connaît bien (comme « L'ouvrier agricole sur la lune », « La paye du samedi », « L'admonition »), sur la ville de Palerme, où il emménage à la fin des années 1960 (« Une histoire vraie »), ou sur des thèmes historiques comme l'unification italienne au XIXe siècle (« Le silence ») et la guerre d'Espagne, telle que vécue par des Siciliens (« La peur »), ou encore la libération de la Sicile par les Américains en 1943 (« Les Allemands en Sicile »).
Ils reconduisent le lecteur à la source de l'inspiration de Sciascia, de son art de conteur. C'est son premier monde : son village, la campagne de la région d'Agrigente, la soufrière, les problèmes du développement économique, le crime organisé (la mafia rurale, propre à cette partie occidentale de la Sicile). Ce sont ses thèmes majeurs : la peur et la pitié (« La paye du samedi », « Le soldat Seis »), la douleur (« Carnezzeria »), la folie (« Le legs »), la femme, l'amour et l'honneur (« L'escroquerie », « Une comédie sicilienne »), le pouvoir (« L'admonition »). On y trouve aussi la première tentative de Sciascia de raconter l'histoire de Racalmuto, son bourg de naissance, au sud-ouest de la Sicile. -
A venir
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Dans Liguries, on découvre un Calvino arpenteur minutieux des paysages, homme de l'espace et non du temps, animé par une pulsion de voir et de décrire qui fut aussi forte que celle de raconter. Liguries est constitué de cinq proses et d'un ensemble de poèmes (les « Eaux fortes de Ligurie », rédigés pendant la période de la Résistance). Les proses s'étalent de 1945 à 1975 : « Ligurie maigre et osseuse », géographie humaine de la Ligurie comparée à une échelle ; « Sanremo, ville de l'or », qui se penche sur le destin de cette ville vouée à l'argent dans une région de pauvres gens ; « Ligurie », vaste et forte présentation des caractéristiques physiques d'où ressort une impression d'inquiétude et de fragilité de la vie ; « Savona :
Histoire et nature », qui suit le plan de la ville dans l'espace et dans le temps ; et « La mer forme le troisième côté » (sur Gênes) ». A travers les textes qui le composent, Liguries est bien un guide de la Ligurie : de son littoral, de son arrière-pays et de deux de ses principales villes, Gênes et Savone. On y suit cette fine languette de terre qui forme comme un accent circonflexe ou un sourcil sur l'oeil de la mer entre la France et l'Italie. On y découvre l'histoire de cette terre de batailles, on y comprend l'économie et la société ligures. -
La ragazza Carla est l'un des textes majeurs de la poésie italienne du vingtième siècle, un « classique
récent de la poésie italienne », comme Umberto Eco l'a défini dès les années soixante. Carla, une jeune
fille introduit un nouveau ton dans la poésie italienne de l'après-guerre, loin des thématiques et des
courants poétiques les plus repérés. Ce « récit en vers » se caractérise par un souci de la quotidienneté, par
son ancrage urbain et sociologique, par le choix d'une jeune femme ordinaire comme personnage central.
Il retrace le difficile chemin de l'émancipation de Carla, en passant par le rapport au travail, à l'argent, au
monde capitaliste, à la morale des années cinquante. Écrit entre 1954 et 1957 et publié pour la première
fois en 1962 par Mondadori, Carla, une jeune fille est considéré non seulement comme le livre le plus
important d'Elio Pagliarani, mais aussi comme l'une des productions poétiques les plus remarquables de
l'après-guerre en Italie. C'est une sorte de fable urbaine du vingtième siècle, sous la forme d'un récit en vers
polyphonique. Le livre retrace les premières expériences d'une fille de dix-sept ans issue des classes populaires
de la banlieue de Milan à la fin des années cinquante. Entre description, narration et analyse, les poèmes
racontent l'histoire d'une jeune fille confrontée à la grande ville industrielle, aux moeurs de son époque, au
monde des adultes et à celui du travail : les cours du soir, le premier emploi, la peur de la séduction, l'agression sexuelle et l'humiliation de devoir accepter une logique sordide afin de ne pas perdre son travail. Les trois
séquences qui composent le livre s'articulent dans un montage de fragments de narrations, de descriptions,
de réflexions. Pagliarani nous conduit d'une scène à une autre, il accélère ou ralentit le rythme, comme dans
un film, approchant ou éloignant notre regard de Carla et de la ville de Milan, autre personnage central du
livre. Carla, une jeune fille est un texte détonnant dans la poésie de l'époque, et qui reste d'une force
et d'une actualité étonnantes. Elio Pagliarani est par ailleurs un auteur dont aucun livre n'a encore été
traduit en français, et les éditions Nous sont heureuses de publier son livre le plus emblématique. -
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A venir
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"Poème filmique" en prose et vers, La Rage est le scénario intégral du film sorti en 1963 (dans une version raccourcie). Un commentaire lyrique qui mélange l'analyse sociale et politique à l'invective, l'élégie à l'épique, en les tissant avec des images des actualités, des matériaux d'archives et des photographies des faits marquants de son époque.
En interrogeant la société de son temps, le poète-réalisateur interroge aussi la nôtre. Dans ce texte, d'une brûlante actualité, on y retrouve le Pasolini le plus politique, le plus âpre et le plus clairvoyant.
« Pourquoi notre vie est-elle domine´e par le me´contentement, l'angoisse, la peur de la guerre, la guerre ? C'est pour re´pondre a` cette question que j'ai e´crit ce film, sans suivre un fil chronologique, ni me^me peut-e^tre logique. Mais pluto^t mes raisons politiques et mon sentiment poe´tique ».
Pier Paolo Pasolini.
Introduction de Roberto Chiesi.
Postface de Jean-Patrice Courtois.
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Cette introduction à Lacan représente un véritable défi à l'égard de la perception répandue de sa pensée, souvent considérée comme peu accessible, voire obscure. Pour inviter à la lecture de Lacan, Zizek mobilise tout aussi bien la « culture populaire », le cinéma, que la philosophie, la littérature et des événements de l'histoire récente. Par des argumentations inattendues, il montre les raisons pour lesquelles le temps de la psychanalyse n'est pas derrière nous, mais bien devant nous.
À travers les idées provocatrices de Lacan, qui ont troublé bien des penseurs, ce sont les vues cruciales de Freud qui apparaissent finalement dans leur véritable dimension. Ce « retour à Freud » a non seulement fourni une nouvelle fondation théorique à la psychanalyse, avec d'immenses conséquences pour le traitement analytique, mais il a aussi mis à disposition de la pensée contemporaine des outils conceptuels incontournables.
Comment lire Lacan n'est pas seulement, comme le titre l'indique, une introduction à l'oeuvre de l'un des penseurs les plus importants du vingtième siècle. Ce livre intervient aussi pour réaffirmer l'importance et la vitalité de la psychanalyse, à contretemps du diagnostic contemporain de sa péremption, voire de sa « mort ». -
Les Journaux de Kafka, toujours surprenants, sont le lieu d'une écriture lucide et inquiète où se mêlent intime et dehors, humour et noirceur, visions du jour et scènes de rêves, où se succèdent notes autobiographiques, récits de voyages et de rencontres, énoncés lapidaires, ainsi qu'esquisses et fragments narratifs plus longs. Dans ce battement entre vie écrite par éclats et soudaines amorces fictionnelles, les Journaux se révèlent être le coeur de l'oeuvre de Kafka : le lieu où les frontières entre la vie et l'oeuvre s'évanouissent.
Cette édition est la première traduction intégrale des Journaux de Franz Kafka. La seule traduction française visant l'intégralité était à ce jour celle de Marthe Robert, publiée en 1954 chez Grasset. Mais elle ne correspond pas à l'intégralité des Journaux de Kafka. En effet, elle se base sur la version établie par Max Brod en 1951 : celui-ci avait procédé à une censure des textes de son ami, en éliminant les noms des personnes encore vivantes, et un certain nombre des remarques qui le concernaient lui-même. Dans sa volonté de faire de Kafka un « saint laïque », il avait également supprimé des passages jugés « obscènes ». Enfin sa chronologie, qui a été suivie par Marthe Robert, s'est avec le temps avérée erronée (la traduction française contenait d'ailleurs un certain nombre de fragments traduits à partir de la version anglaise, plus complète que l'édition originale en allemand - avec tous les risques qu'une traduction de traduction comporte). Se pose enfin la question, cruciale, de la place à accorder aux fragments fictionnels. Dans l'édition de « La Pléiade », ils sont absents du volume contenant les journaux. Or, ces textes figurent dans les mêmes cahiers manuscrits qui contiennent les notations « diaristes ». Et il y a un intérêt certain, par exemple, à pouvoir lire dans la continuité la première version, manuscrite, d'une nouvelle et, immédiatement après, le commentaire qu'en fait Kafka.
Les Journaux ce sont, matériellement, 12 cahiers in-octavo. Ils couvrent les années 1910 à 1922, avec de fortes disparités quant à la fréquence et à la longueur des notations. Kafka ne faisait pas de différence, quant au support d'écriture, entre la fiction et « l'autobiographie », celle-ci étant évidemment liée au projet de la tenue d'un « journal ». Nous suivons donc la leçon qui a été proposée dès 1990 par les éditeurs allemands de la « Kritische Ausgabe », qui ont reproduit à l'identique les cahiers manuscrits. La chronologie qui en résulte est très différente de celle de Max Brod. Le texte corrige aussi certaines erreurs du déchiffrage initial des manuscrits.
Cette version est donc la première à traduire en français l'intégralité des cahiers des journaux à partir des manuscrits. La traduction de Robert Kahn reste au plus près de l'écriture de Kafka, en préservant les litotes, la syntaxe, en « laissant résonner dans la langue d'arrivée l'écho de l'original ». Elle s'inscrit ainsi à la suite de ses retraductions remarquables des lettres À Milena (2015) et des Derniers cahiers (2017).
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Les éditions Nous poursuivent leur travail de révélation du grand écrivain italien. Dans ce magnifique « portrait de ville » on retrouve l'écriture puissante et la lucidité politique de Carlo Levi, son regard à la fois aigu et tendre sur Rome et ses habitants. La Rome de Carlo Levi est une ville noble et plébéienne, ancienne et absolument actuelle, ville hors du temps qui demeure toujours fugitive, sa beauté âpre étant toujours prête à surgir là où on l'attend le moins. Les pages de ce livre, écrites entre 1951 et 1963, donnent à voir une multitude de personnages, véritables portraits vivants d'un monde populaire : petits métiers et trafics, vie des quartiers, fêtes rituelles, évolutions et dégradations de l'urbanisme, rémanences de l'époque fasciste. Toute une multiplicité, venue lentement d'une civilisation très ancienne, se trouve agitée par une philosophie de vie aussi flegmatique que sceptique, et pourtant dotée d'une vitalité incroyable. « C'est le peuple le moins rhétorique, le moins idolâtre et le moins fanatique de la terre. Même le temps ne les émeut pas, ne les effraie pas, car il est devant leur porte, palpable au bout leurs doigts. »
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Au bout de la langue est le premier essai philosophique de Martin Rueff aux éditions Nous. L'auteur expose dans ce livre une approche très personnelle de la langue, entendue dans tous les sens du mot, à la fois comme organe et comme capacité d'expression. En jouant avec la polysémie du terme, qui permet une appréhension à la fois physique, symbolique et philosophique de la langue, Martin Rueff propose un essai passionnant, à la fois érudit - riche d'exemples très variés provenant de traditions, d'époques et de langues différentes - et très facile d'accès, se démarquant par une grande clarté d'exposition et une adresse directe aux lecteurs. La transversalité de l'approche (phonologie, linguistique, philosophie, mythologie, poésie, physique) est portée et unifiée par une écriture prenante et un ton très libre, non dénué d'une forme de légèreté, voire d'humour.
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Après la réhabilitation de la romancière, la découverte de la poète. Élégie pour une jeune fille en noir est un inédit de Hélène Bessette, seul texte de poésie dans son oeuvre. La forte tonalité autobiographique, l'extrême simplicité de la langue donnent à voir la confession et le regret d'une passion amoureuse qui s'adressent, au seuil de la mort, à une mystérieuse jeune fille en noir. Il s'agit d'un ultime livre bouleversant, soutenu par la force et la singularité d'une écriture conclusive et secrète.
Acclamée par de nombreux auteurs et critiques - Claude Mauriac, Alain Bosquet, Nathalie Sarraute ou Marguerite Duras (« La littérature vivante, pour moi, pour le moment, c'est Hélène Bessette, personne d'autre en France », disaitelle) - Hélène Bessette a publié 13 romans chez Gallimard entre 1953 et 1973, chacun mettant à mal les codes narratifs traditionnels. Dans son oeuvre, dont l'édition intégrale a été entreprise par Othello (Le Nouvel Attila), un seul texte fait exception, semblant s'écarter in extremis de la forme romanesque. Il s'agit d'Élégie pour une jeune fille en noir, sur lequel Hélène Bessette travailla les dernières années de sa vie.
Ce long poème lyrique peut être lu de plusieurs manières : comme la déclaration d'une femme vieillie (Je reste sidérée / d'être vieille / Je pensais tant ne l'être jamais) à la jeune fille aimée, confession rétrospective d'un amour homosexuel resté secret et impossible. Ou comme une adresse, depuis la vieillesse, à la jeune fille qu'elle était et qui n'est plus. C'est une sorte d'« élégie autobiographique », écrite au seuil de la mort - Hélène Bessette s'y livre dans une langue tendue, magnifiquement dense et musicale. Dans ce long chant mélancolique, elle retraverse sa propre vie, sa propre jeunesse, elle se raconte avec l'intransigeance qui aura toujours été la sienne, poussant jusqu'au bout, une dernière fois, l'exploration des singularités de sa langue.
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Nous crachons sur Hegel est le livre le plus connu de Carla Lonzi, ici traduit intégralement pour la première fois. Il expose et concentre toute la pensée de cette figure emblématique du féminisme radical italien, et sera accompagné d'une postface soulignant l'inscription évidente de cette voix puissante dans la constellation des féminismes d'aujourd'hui. Le titre résume de la manière la plus irrévérencieuse la critique féministe du « projet révolutionnaire » marxiste - dont Hegel est la métonymie. Repère décisif de l'histoire du féminisme, cette pensée « à coups de marteau », à la fois en décalage avec les revendications féministes de son époque et en résonance anticipée avec les débats d'aujourd'hui, apporte des éclairages d'une étonnante fraîcheur sur des thématiques aussi diverses que le corps, les enjeux socio-politiques du désir, du sexe et de l'amour, le patriarcat en tant qu'instrument capitaliste et culturel de domination.
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Tout autre chose est le premier livre de Claro aux éditions Nous. Il s'agit d'une sorte d'inventaire d'objets plus ou moins matériels, plus ou moins banals, en tout cas supposés quotidiens. Dans une langue à la fois sombre et précise, ces textes expriment l'inquiétude vis-à-vis de ces objets (couteau, coussin, ampoule, clou, caillou, clé...) qui - investis par le regard et les affects de l'observateur - s'animent d'une présence étrange, d'une sorte de vie onirique, voire cauchemardesque. Le quotidien en ressort modifié, il semble changer d'échelle, s'animer d'une puissance énigmatique et hors contrôle. Chaque texte est un mélange subtil de gravité, d'hallucination et d'humour, qui peut rappeler l'univers de Kafka. « Plutôt que d'isoler l'objet et d'en exploiter l'exacte nature, j'essaie de lui faire rendre gorge, de le machiner avec nos pulsions, de le traiter comme une chose animée, voire animale. Voir en l'objet, non pas la matière ou la forme, mais des possibles, et des impossibles ; le traiter sans ménage, le triturer, et le laisser se retourner contre nous (l'auteur, le lecteur). » [Claro]
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Ce livre rassemble les manifestes de la poète Mina Loy. Écrits entre 1914 et 1919, ces écrits incisifs portent autant sur la politique que sur l'esthétique et constituent les différentes facettes d'un programme radical et résolument moderne pour l'émancipation des femmes et des hommes dans les sociétés occidentales. Égalité hommes-femmes, libération sexuelle, éthique du courage et autonomie : autant des thèmes qu'abordent ces écrits polémiques, qui avec leur langue puissante et leur registre enragé tentent d'opérer la conjonction difficile entre les tendances individualistes typiques du modernisme et la révendication d'une démocratie égalitaire, donnant enfin toute leur place aux femmes en tant qu'individus autonomes. Mina Loy y livre son affirmation radicale d'une éthique du courage ainsi que des refléxions - sur le sexe et l'amour, sur le mariage, sur la prise de conscience du corps... - qui résonnent fortément avec les problématisations féministes d'aujourd'hui, et constituent une étape incontournable dans l'histoire du féminisme européen. Le Manifeste féministe, écrit en 1914, très connu dans le monde anglo-saxon, est suivi des « Aphorismes sur le futurisme », et de plusieurs textes courts sur la constitution d'une société démocratique prenant en compte les découvertes alors récentes de la psychanalyse, des « Aphorismes sur le modernisme », des « Notes sur l'existence », des réflexions sur « L'artiste et son public »...
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Une minute de latitude est en cinq dimensions. La première est l'adaptation écrite d'une minute de captation quotidienne, de la vie portuaire de Marseille, durant dix mois, depuis le même angle de vue, au septième étage d'une tour vitrée : le lieu du travail. La seconde, sonore, est la transcription de conversations captées dans l'open space durant les temps de pause : le contrepoint. La troisième est une transposition graphique des photographies : la vignette. La quatrième dimension est la consigne méthodique d'une météorologie visuelle : le temps. La dernière est celle d'une échappée intérieure : la fugue. Une minute de latitude est le résultat d'un travail du regard, d'une insistance sur le motif, et un journal de lutte contre l'enfermement.
Au nom de quoi faudrait-il consigner tout ce qui se déroule durant cette minute de capture ? Au nom d'une astreinte à l'exercice d'évasion ou d'un exercice d'enfermement sans la promenade ? L'échappée belle, un acte de résistance ? Au nom de quoi faudrait-il tout métamorphoser ? Au nom du mouvement interdit ? De la nécessité de la joie ? De la respiration ? -
Insel ou portrait de l'artiste en tête de mort fut écrit au coeur des années 1930, période à laquelle Mina Loy, figure emblématique des avant-gardes littéraires et artistiques de son temps, vit à Paris et y fréquente de nombreux artistes : Tzara, Ernst, Dali, Giacometti, Man Ray, ainsi que Richard Oelze, dont est inspiré le personnage d'Insel. Insel, seul roman de Mina Loy, narration méticuleuse et distanciée, est écrit dans une langue d'une puissance et d'un souffle rares.
Le roman est situé à Paris, entre l'atelier de la narratrice, son appartement, l'atelier d'Insel, l'Hôtel Lutétia, les cafés de Montparnasse (le Dôme, le Select), la Gare d'Orsay, les boulevards, les rues de la déambulation nocturne qui semblent ne jamais atteindre l'aube. Le roman donne à voir la relation passagère et profonde qui lie deux êtres dont l'un, la narratrice, cherche à saisir le vrai-faux mystère de l'autre, le personnage principal.
Le personnage d'Insel est l'incarnation de l'artiste moderne : sublime et dérisoire. Mina Loy a tenté de dévoiler de l'intérieur toutes les ruses de la psyché d'un artiste, d'un créateur en état de crise. Dès le début de la relation entre les deux personnages, il souffre d'un mal assez singulier - lequel, sans aucun doute, participe de son charme -, d'une pathologie de l'absence qui l'empêche « d'être là ». La thérapie de Madame Jones, son unique amie, consistera alors à l'amener peu à peu à l'existence; c'est-à-dire à le concrétiser, le matérialiser.
Figure du grandiose et du grotesque à la fois, Insel est tour à tour sujet et objet, manipulé sous la loupe et au scalpel, sans relâche. La loupe est ironique; et le scalpel, compassionnel.
Par-delà le personnage d'Insel (et des protagonistes contemporains, affublés ou non de pseudonymes, qui font des apparitions furtives au fil de la narration : Julien Levy, Peggy Guggenheim, Man Ray, Salvador Dali...), Mina Loy traque la figure de l'artiste, qu'elle met à nu. La langue de Insel dépose à même la page toute la merveilleuse étrangeté du mode de penser, de pressentir, d'imaginer de l'autrice. La prose de Mina Loy procède de la froideur du chirurgien qui opère à chaud, elle musicalise en images les variations intérieures de l'intelligence et de la cruauté du coeur.