L'exode ? Pour Lucien, pas de quoi abandonner la belle moisson qui s'annonce. A Verdun, en 14, il en a vu d'autres. Et puis, maintenant, la France possède sa ligne Maginot... Pourtant, un matin, c'est la panique. Le voilà contraint de partir avec sa petite famille. Objec- tif : la Loire, il faut franchir la Loire...
« Monsieur, monsieur... vous êtes cultivateur ? deman- da-t-elle avec un fort accent du Nord.
- Oui... ça se voit pas ?
- Est-ce que vous auriez du lait ? » Et, comme elle s'attendait sans doute à un refus, elle ajouta :
« On a de l'argent. On vous paiera le prix. C'est pour les enfants. On n'a plus rien à leur donner. » Lucien était perplexe. Quelque chose le dérangeait dans ce spectacle de misère...
1794, l'époque révolutionnaire bat son plein et la guillotine fonctionne à tout-va. À Paris, le marquis de Guéau vient d'être guillotiné. Le fils navigue sur les océans, à l'abri des vagues, tandis que sa femme, Madame de Bonvoust, se réfugie avec sa fille nouveau- née au domaine de Reverseaux, propriété du marquis, dans la région de Chartres, elle part rapidement se réfugier en Angleterre, laissant sa fillette à une nourrice, dans le plus grand secret.
Les petites gens continuent à vivre autour du château du marquis guillotiné comme si de rien n'était. La Révolution a fait peu de vagues, et leur travail permet de les faire vivre. Un régisseur honnête surveille tout ce petit monde, ce qui permet au domaine de Reverseaux de survivre aux spéculateurs qui achètent successivement le domaine sans jamais y mettre les pieds.