Pierre Rusch
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Mémoires en conflit : Points de fuite de l'Holocauste et du colonialisme
Natan Sznaider
- Maison Des Sciences De L'Homme
- 17 Avril 2025
- 9782735129553
Prenant comme point de départ la polémique autour de l'historien camerounais Achille Mbembe en Allemagne en 2020, Natan Sznaider met en perspective, sous l'angle de la sociologie de la connaissance, deux récits moraux qui semblent s'exclure mutuellement. Quel événement, de l'Holocauste ou du colonialisme, constitue l'archétype des plus grands crimes de l'histoire de l'humanité ? Les mémoires européenne et non européenne semblent irréconciliables sur ce point, chaque partie revendiquant de tirer les leçons d'une histoire cruelle, et donc de se trouver du bon côté de l'Histoire. Le débat ne peut-il donc qu'être unilatéral ?
En revenant sur les penseurs qui ont marqué la réflexion sur cette question jusqu'à aujourd'hui, comme Claude Lanzmann, Frantz Fanon, Hannah Arendt et Edward Said, l'auteur entreprend de faire émerger la possibilité d'une troisième voie, au-delà de la dichotomie entre l'universalisme et le particularisme. Une voie où universaliser n'est pas relativiser les expériences particulières -
Ce que social veut dire Tome 2 ; les pathologies de la raison
Axel Honneth, Pierre Rusch
- Gallimard
- Nrf Essais
- 15 Janvier 2015
- 9782070143436
Le tome I de Ce que social veut dire (2013), centré sur "Le déchirement du social", dégage, par le biais notamment d'une confrontation avec la tradition de la philosophie sociale (Sartre, Lévi-Strauss, Merleau-Ponty, Castoriadis, Bourdieu, Boltanski et Thévenot), le modèle du conflit mis en oeuvre par la théorie de la "lutte pour la reconnaissance".
Mais se pose alors le problème de la justification normative de ce modèle. Deux possibilités s'offrent, qui ont longtemps paru s'exclure mutuellement : soit la valeur normative des luttes pour la reconnaissance est appréciée selon ce qu'elles apportent à la réalisation d'une "vie bonne" parmi les membres de la société ; soit leur rôle normatif se mesure à leur contribution à l'instauration de la "justice" sociale dans la société. Dans le premier cas, c'est la réalisation individuelle de soi qui constitue le critère normatif, et, dans le deuxième, la répartition équitable des libertés individuelles entre tous les membres de la société.
Renouant avec la tradition de la Théorie critique, Honneth se confronte ici avec Adorno, Benjamin, Neumann, Mitscherlich, Wellmer, mais aussi la psychanalyse et la théorie de la justice ; il établit qu'à la différence d'autres terminologies morales qui peuvent être mobilisées pour juger de l'état normatif des sociétés - que ce soient les concepts d'"aliénation" ou de "réification" d'un côté, de "discrimination" ou d'"exploitation" de l'autre, mais qui ne relèvent que de la philosophie sociale ou de la philosophie politique -, la lutte pour la reconnaissance est à la fois l'indicateur d'une pathologie sociale et l'indice d'une injustice.
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Pour une anthropologie benjaminienne
Cécile Gribomont, Pierre Rusch
- Kime
- Revue Incidence
- 17 Novembre 2023
- 9782380721157
L'anthropologie, science de l'homme qui s'attache à interroger la relation de l'être humain au monde, par l'analyse des formes de son être naturel, historique et social, constitue sans doute la meilleure perspective pour ressaisir l'unité de la pensée protéiforme de Walter Benjamin, sa puissance de suggestion et sa frappante actualité. À l'heure où nous sommes requis de trouver de nouvelles approches dans nos manières de vivre, de penser et d'agir, la revue Incidence a sollicité des chercheurs familiers de l'oeuvre de Walter Benjamin pour nous donner accès à cette réflexion philosophique difficile et tenter d'élucider son caractère énigmatique, qui intègre la contradiction. À travers certaines notions benjaminiennes essentielles : la mimésis, le langage, le rêve, l'image, la « volonté de bonheur », l'enfance, « Le voyage mimétique », l'« espace de jeu », la « nature dans l'humain », la domination, l'oeuvre est chaque fois envisagée à la fois dans son ensemble et dans son mouvement, dans sa cohérence et ses ruptures. Elle nous dévoile les chemins que pourrait emprunter une anthropologie alternative en vue d'une pratique politique émancipatrice. Dans sa rubrique Prismes, Incidence rend hommage au psychiatre et psychanalyste Patrick Lacoste disparu le 2 novembre 2022, membre, depuis l'origine, du comité de rédaction et de lecture de la revue, fondateur par sa présence active et la densité de sa réflexion. La reprise d'un de ses textes essentiels et aux profonds accents benjaminiens : « La magie lente », rappelle avec insistance - et au vif de la clinique - la nécessité, pour la psychanalyse, de donner sa juste place à la force des mots. Cela en se méfiant de toute crédulité vis-à-vis d'un acte magique qui opérerait soudainement dans la parole, mais en misant résolument sur le temps long du dire dans la cure, le temps nécessaire pour que le pouvoir des mots puisse s'exercer aussi bien du dehors que du dedans.
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L'oeuvre monde ; essai sur la pensée du dernier Lukacs
Pierre Rusch
- Klincksieck
- Esthetique Klincksieck
- 21 Octobre 2013
- 9782252039083
À partir de l'oeuvre du dernier Lukács (1885-1971), cet essai vise à dégager quelques axes directeurs d'une pensée intégrée de l'homme, de la société et de la culture. La préoccupation majeure est de restituer cohérence et dignité à une réalité toujours plus morcelée : la vie quotidienne, lieu de toutes les aliénations, contient aussi en germe les formes d'activité les plus exigeantes et les plus rigoureuses. L'histoire montre certes comment ces sphères (spécifiées en religion, philosophie, droit, art, science, technique) se différencient et s'autonomisent progressivement, forgeant une nécessité propre qui vient se superposer à leurs fonctions sociales. Mais l'exigence morale s'accroît parallèlement de réintégrer toutes les avancées de l'esprit humain, et le souvenir de son histoire, dans une conscience commune de l'humanité. L'oeuvre d'art a ici une valeur paradigmatique, dans sa capacité à créer des mondes démarqués du monde vécu, à la fois témoignages et revendications.
Pierre Rusch est philosophe, traducteur et enseignant. Son travail porte plus particulièrement sur la pensée allemande de l'entre-deux guerres et les représentants d'un marxisme non exclusif (Walter Benjamin, Max Raphael, Carl Einstein), avec pour thématique dominante l'intégration philosophique de l'anthropologie. Le présent ouvrage est issu de sa thèse de doctorat, présentée en 2008 à l'ÉHESS. -
Théoricien de premier plan, Georges Lukacs (1885-1971) laisse une série d'oeuvres emblématiques, dont La Théorie du roman. Le colloque réuni à Budapest en 2010, dont cet ouvrage est issu, a voulu examiner son oeuvre sous l'angle de son actualité pour nous aujourd'hui. Dans le domaine de l'éthique comme dans l'esthétique, dans la politique et la théorie sociale comme dans l'ontologie, Lukacs a laissé des traces durables et décisives.
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L'enjeu de "SANS (FR) 1628-1924" est de mettre en évidence l'irrépressible essor en France, des Lumières au commencement du XXe siècle, d'une forme, d'un genre d'écriture aux mille facettes qui va de soi et s'épanouit dans le devenir commun. Cette forme est le Sans, c'est-à-dire la lettre sans empattements, ou « bâton » comme on l'appelle encore aujourd'hui dans certains manuels scolaires. Sans : une préposition qui désigne ce qui manque, fait défaut, n'est pas, ou plus, présent. En typographie, ce terme fait référence aux caractères dépourvus d'empattements, ces traits horizontaux, situés perpendiculairement à l'extrémité des fûts des lettres de l'alphabet latin. Comment évoquer, décrire une chose si évidente, qui peut aussi bien émaner de quelques gestes personnels et simples que d'un processus technique complexe ?