Belle, sauvage, cruelle, inutile, Dominique n'a en tête que le quart d'heure qu'elle vit, et qu'elle dévore comme un chancre à pattes juste pour dire « merde ! » Dans le Quartier latin des années soixante, elle remorque une bande de jeunes oisifs, dolents et insolvables (donc libres) qu'au fond, la vie emmerde. Et qui ne cherchent qu'à retarder le moment de faire ce qu'il ne leur plaira pas. Tiré du film La Vérité (1960) - Michèle Perrein en a co-écrit le scénario avec Henri-Georges Clouzot - La Flemme est le portrait d'une jeune femme bousillée par les hommes - un homme en particulier - au-dessus de laquelle plane une ombre grise et suintante...
La belle, la sauvage, la fantasque marthe, une fois passée la quarantaine, règne sur une île spongieuse du bassin d'arcachon où passent les cormorans et les hérons cendrés. princesse aux mains blanchies par le travail quotidien de la pêche, souveraine obstinée et insoumise entourée d'une mystérieuse cour masculine et enfantine, marthe est également prête à tous les combats pour que son île, bassalane, où fleurit le cotonnier, ne tombe pas dans les mains des promoteurs et autres marchands de bonheur estival. on doit ce superbe et bouleversant portrait d'une femme d'aujourd'hui, qui refuse les compromis mercantiles et les faiblesses sentimentales, à une michèle perrein dont le talent picaresque et pictural atteint ici son sommet. a la façon de nos grands romanciers du xixe siècle, qui étaient aussi des journalistes, l'auteur du {buveur de garonne} a passé des mois dans le bassin d'arcachon, à observer et comprendre l'existence des gens de la mer, ces seigneurs d'une époque où les esclaves des villes croient avoir le beau rôle. aussi bien, {les cotonniers de bassalane} est un extraordinaire chant d'amour à la nature d'un pays qui est le sien, doublé d'une leçon de courage, de droiture et de dignité.
Enfouie au plus secret de la haute lande archaïque et sauvage, la Margagne est une vieille maison de torchis. Vivante comme l'espoir, désespérée comme la mort, sa propriétaire lui ressemble. Quarante-trois ans, mariée, journaliste parisienne, trois fils adolescents, Zélie, rebutée par son métier et que les turbulences mondiales agressent, s'imagine que l'odeur des pins, l'ombrage des chênes et les défilés de chevreuils sous vol plané de busards vont l'aider à régler ses comptes solitaires avec elle-même - et aussi, peut-être, avec son mari. Soudain, un mardi soir, débarquent une fille et deux garçons dont un seul lui est connu, Dominique. Incapable de se faire leur complice ni d'être leur otage, Zélie se débat face au danger qui la met et les met en péril... Sa réalité désormais : une peur tenace... L'arrivée d'Arnaud, son fils aîné, lui permettra-t-elle d'esquiver la situation sans trahir personne ?
Rhada, fille d'Osman et de Djinnih, la triomphante réprouvée, s'enfuit un jour de sa tribu sur Noir, le cheval qu'elle a volé, pour courir le monde à la rencontre de la vie ; à dix-sept ans, elle a décidé de ne pas se laisser marier. Commence alors pour elle une errance, pleine de péripéties et de surprises, à travers une steppe poussiéreuse où elle rencontre un nomade aux yeux coupants, un ermite, un soldat, avant d'associer son destin de vagabonde à celui d'un jeune garçon, Prisko. Ensemble, ils quittent les abords de la ville, gagnent l'île du lac où ont vécu des hommes peut-être heureux dont il ne reste que des traces à demi-effacées. Des soldats les en sortiront et les deux fugitifs, libres - du moins l'espèrent-ils -, entrent dans la Cité neuve affolée et mécanisée. Prisko et Rhada s'enfuiront de nouveau pour tenter de gagner leur île et quelque chose qui devrait être la vraie vie... Dans ce roman quasi initiatique, Michèle Perrein a laissé caracoler sans entraves son inconscient et son imagination, qui l'ont entraînée dans un univers d'apparence exotique, en tout cas différent du nôtre. Mais, en vérité, cette fuite, qui est une quête, donne naissance à une superbe fable, des plus contemporaine. A la suite de Rhada, si vivant personnage dans ce décor d'angoisse, c'est la jeunesse qui faufile son parcours "comme une fourmi cavalière", la femme son combat, la liberté son chant, tandis qu'au rythme d'une véritable aventure d'amour, de risques, de sensuelles découvertes, galope le train des rêves noirs et des merveilles.
"Si je me bats, si j'ai accompli le grand tour qu'est ce livre, si je me suis nettoyée de beaucoup d'illusions, c'est comme on ôte les gants de convention, de protection. Dans la seule vérité passe un souffle de liberté. J'aimerais que des femmes m'entendent, se dégantent, attrapent leur vie à mains nues. Le seul monde qui existe est un monde de lutte.
Je réclame la sagesse active, que les femmes ne se résignent pas. Si nous parvenons à sortir de nos conditionnements, à éclater hors des barrières de nos pâturages, à danser notre propre danse, à ruer contre la force imposée, à refuser d'imposer notre force relative, nous changerons fatalement la face du monde parce que nous ferons gripper tous les rouages. Est-ce utopie ? C'est la seule issue. Nous sommes devenues l'enjeu d'une bataille. Un travail de récupération est entamé pour nous piéger à droite, pour nous avoir à gauche, pour nous faire endosser les actes que nous n'avons pas commis, préméditer en second les crimes à commettre. Nous pouvons refuser. Nous pourrions inventer !"
La Sensitive est l'histoire de l'éducation sentimentale d'Odile, dans un Bordeaux à mi-distance entre la Libération et Mai 68. Les protagonistes ? Des étudiants sur lesquels la bataille pour la vie n'est pas encore entamée. Pas entamée ? Pour une sensitive, qui fait comme si vivre et foncer étaient synonymes, tout basculera dans le tragique. Malgré l'obsession du {grand-amour-toujours}, Odile a fait des rencontres qui ont brouillé son trop idéal objectif. Confrontée à la violence passionnée de l'autre sexe - en la personne de Jacques Vielmas -, elle n'entreverra pas la violence du sien. Odile était lucide ; Odile était aveugle. Cette contradiction, plus de vingt ans après, m'a suggéré {l'Innocence coupable} et ces pages nouvelles qui, regardant de plus loin le gâchis, en atteignent le coeur. L'innocente sensitive n'a qu'à demi pris garde à elle. Coupable, elle n'a pas assez gardé l'autre. L'adolescence a capoté. Une adolescence qui finit mal a beaucoup de mal à finir.
Il était une fois un homme, une femme... Ayant vécu ensemble, ils ont beaucoup parlé et pensent se connaître. Un jour, ils décident de {s'écrire}, de se raconter l'un à l'autre leur enfance, leurs amours, leurs échecs. Ils croyaient se lancer dans une entreprise facile mais les mots qui se heurtent dans leurs lettres alternées remettent leur vie en question. Ils s'interrogent, mais, s'exposant totalement au jeu de la vérité, le duo devient duel. L'aventure épistolaire frôle le drame. Est-ce l'apothéose saignante d'une rupture qui s'annonce ? Ils ne se sépareront pas. Au contraire, ils se rapprocheront l'un de l'autre parce que, poussé, contredit, aidé par une femme, un homme acceptera d'accoucher du petit César qui vit en lui, ni plus ni moins fragile et solide que tous les autres hommes. Cette parole d'homme qui jaillit pour la première fois, les femmes l'espèrent depuis toujours et beaucoup d'hommes, aujourd'hui, tentent de l'exprimer. Elle est dans ce livre et prouve qu'on ne meurt pas d'elle. Elle aide à respirer les hommes comme les femmes.