Martin Crimp
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En pleine nuit, Tilman et Josefi ne font irrupti on chez deux universitaires proches de la cinquantaine, Paul et Julia. Julia semble avoir invité le jeune couple - à l'insu de Paul. Est-ce une fête ? un mirage mental à la faveur de la nuit, entre cauchemar indéchiff rable et banale crise d'un couple qui tente de se réinventer ? Cett e surprenante visite devient rapidement le catalyseur de révélati ons inatt endues. Autour de la questi on de la maternité se cristallise leur diff érend. Une agressivité permanente point dans ces dialogues acérés, qui mett ent en scène les fi ssures d'un vernis social, en apparence sans aspérités, jusqu'au premier coup de poing porté.
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Quand nous nous serons suffisamment tortures / messager de l'amour
Martin Crimp
- L'arche
- 5 Juin 2020
- 9782851819819
Dans un univers proche de Misery ou de My Absolute darling (Gabriel Tallent) Marti n Crimp excelle dans sa dernière pièce à disséquer les arcanes d'un désir sadien. Elle est sous-ti trée : « Douze variati ons sur Pamela de Samuel Richardson », l'un des tout premiers best-sellers à scandale de l'histoire du livre. Sorti en 1740, il emprunte la forme d'un roman épistolaire, qui aurait largement infl uencé Les Liaisons dangereuses. L'ouvrage rencontra un immense succès. Il y eut des réponses d'écrivains indignés, l'accusant de prôner la prosti tuti on, dont une inti tulée Shamela ; en quelque sorte le 50 Nuances de gris du XVIIIe siècle. Il connut maintes adaptati ons, dont celle de Goldoni.
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Un repas de Noël en famille est interrompu par l'arrivée inattendue de l'Oncle Bob. Qui est-il ? Pourquoi est-il venu ? Pourquoi sa femme reste-t-elle dans la voiture ? Bob et Madeleine sont aux prises avec la perspective du bonheur dans un monde où la seule foi réside dans l'épanouissement personnel. Après avoir montré un monde asservi à la tyrannie du moi, Martin Crimp suggère que même le rêve dantesque de l'harmonie et de la lumière est une illusion de plus.
Martin Crimp n'est pas un auteur qui raconte des histoires. Il les amorce, il les démarre ; son art consiste plutôt à rendre à cette réalité toute sa complexité. Il capte à nouveau ce qui provoque des doutes, ce qui nous oblige à réfléchir, sur ce que nous voyons et sentons, ou plus précisément, sur ce que nous ne voudrions ni voir ni sentir.
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Ce qui frappe dans les deux pièces réunies dans ce volume, c'est leur impact émotif sur le lecteur/spectateur. Crimp arrive à restituer le choc qu'exerce sur nous la violence avec des moyens qui sont à l'opposé de ce que l'on voit quotidiennement à la télévision ou au cinéma. Aucune image brutale ; et au lieu de la résonance des explosions, il fait chanter un blues. Il arrive à ce que nous nous interrogions sur la question du progrès en martelant une phrase : « Les choses s'améliorent. »
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Ce n'est pas seulement un jeu Mais plutôt un enjeu qu'un jeu Nous parlons réalité Nous parlons humanité Nous parlons d'une histoire qui va Nous ACCABLER par l'absolue totalité et l'entière crédibilité de la tri-dimensionnalité LA TRI-DIMENSIONNALITÉ De toutes les choses qu'Anne peut être TOUTES LES CHOSES QU'ANNE PEUT ÊTRE !
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Le reste vous le connaissez par le cinéma
Martin Crimp
- L'arche
- Scene Ouverte
- 4 Mars 2015
- 9782851818607
Entre Étéocle et Polynice, le conflit surgit parce que l'un des deux frères, Étéocle, ne veut pas respecter ses engagements. Refusant de céder la cité de Thèbes à son frère au terme d'une année, il rompt son serment. Polynice, en revanche, lève une armée pour renverser l'usurpateur et reconquérir le trône de Thèbes dont Etéocle l'a évincé. Leur mère, Jocaste, essaie de réconcilier les « frères ennemis » - en vain. Euripide choisit un choeur de jeunes filles, en voyage à Delphes, qui devient à Thèbes témoin des événements cruels qui marquent la destinée des Labdacides.
Martin Crimp renoue dans cette pièce avec les origines antiques et sacrées de la tragédie. Il désarme son lecteur contemporain, sans désamorcer la lutte fratricide, en présentant une version radicalement moderne des Phéniciennes d'Euripide, portée par un choeur de douze mystérieuses jeunes filles. Il renoue ainsi avec la vocation politique de la tragédie grecque et avec sa force lyrique. Pourquoi le dieu de la Terre est un dieu de la Guerre ? Pourquoi métamorphose-t-il l'être humain en boucher ? Et quel est le sens qui se cache derrière des mots comme « gloire », « peuple » et « justice », au nom desquels on justifie de nouvelles violences ?
Une pièce d'une acuité politique vive et troublante, traitée avec la finesse et le tranchant d'une lame d'acier où, pour reprendre les mots de René Char sur Oedipe et la lignée maudite des Labdacides, "la lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil".
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je savais qu'il serait difficile d'atteindre cette ville.
ce ne serait pas comme de prendre un avion pour marrakech, par exemple, ou lisbonne. je savais que le voyage pourrait durer des jours ou même peut-être des années. mais je savais que si j'arrivais à trouver la vie dans ma ville, et si j'étais capable de décrire cette vie, les histoires et les personnages de la vie, alors moi-même - c'est ce que j'imaginais - je pourrais devenir vivante.
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La pièce pourrait être une pièce policière car elle dispose de tous les éléments qui assurent la tension par laquelle le lecteur/spectateur peut être captivé. Mais elle ne livre ni une explication « technique » de ce qui s'est passé ni une fin mettant un terme à notre incertitude. Alors que la dramaturgie britannique est traditionnellement bridée par la force de l'intrigue, Crimp s'en libère et propose un angle d'attaque quasi philosophique.
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Le théâtre est le lieu ou le corps porte la voix. Ce sont ces voix, que travaille Martin Crimp dans les morceaux réunis ici. La Pièce nous plonge dans l'intimité d'un couple anglais, lui dramaturge et elle comédienne sur le déclin, empêtré dans ses luttes intestines. Le couple peut-il survivre a l'enlisement dans la médiocrité et a l'ambition personnelle de chacun de ses membres ? Ces scènes de la vie d'un couple nous questionnent sur l'individualité de la voix.
Dans Quatre personnages imaginaires, c'est la posture de l'auteur qui est pensée sur le mode de la déprise : le narrateur y relate sa rencontre avec l'Auteur. La quête de cet être a part, de ce sujet en soi et pour soi, s'avère tyrannique. Dans Quatre pensées malvenues, Rubans de magnésium et Vrai Faux Baiser, la voix se révèle comme un espace privilégié pour dire l'intime.
Ne en 1956 dans le Kent, Martin Crimp débute sa carrière de dramaturge en écrivant pour la radio. Ses pièces traitent de la violence contemporaine avec cruauté et humour.
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Les nourrices de la Grèce racontaient aux enfants qu'un jour qu'ils voyageaient, Héraclès et sa jeune épouse, la belle Déjanire, parvinrent au bord d'un fleuve infranchissable. Un centaure propose de les faire passer sur l'autre rive. Il prend Déjanire sur sa croupe. L'eau traversée, il veut la violer. Héraclès le transperce d'une flèche. Le centaure mourant dit à Déjanire : " Mélange dans un peu d'huile le sang qui coule de ma blessure et ces quelques gouttes de mon sperme : ce sera un philtre d'amour. " Les Trachiniennes racontent la suite : apprenant que son mari vient de raser une ville pour conquérir une jeune fille, la belle Déjanire décide de lui envoyer une tunique enduite de la potion du centaure. Héraclès s'en revêt. Aussitôt, il souffre mille morts sans pouvoir mourir, de sorte qu'il se suicide. Le centaure est vengé.
Dans Tendre et cruel, Héraclès est le Général, combattant au service d'un État impérialiste, Déjanire est Amelia, la femme du Général, le centaure un chimiste de notre temps.
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Crimp est un connaisseur de la littérature française et son intérêt pour la structure des textes a été renforcé par ses traductions de Genet, Molière et Ionesco. Le Traitement raconte l'histoire de Jennifer et Andrew, deux producteurs de film qui, à la recherche d'un sujet, rencontrent une femme abusée par son mari. Ils s'approprient son histoire et la modèlent selon leur goût dans les règles de « l'art ». Pour Crimp, la pièce est une description de ce que « l'art doit faire à la vie pour qu'elle devienne l'ombre d'elle-même ».
Atteintes à sa vie reprend en quelque sorte le même thème. Dix-sept scènes essaient de cerner le caractère d'une personne qui s'appelle Anne mais qui ne se montre jamais. Dix-sept tentatives pour se rapprocher de « quelque chose » qui, justement, ne pourra jamais être définitivement saisi. Ici encore Crimp s'avère être un auteur dramatique de premier ordre.