Le présent essai est une approche intime de l'expérience créatrice chez Asger Jorn, Karel Appel et Pierre Alechinsky, trois peintres issus du mouvement Cobra (Copenhague, Bruxelles, Amsterdam, 1948-51). Il pourra surprendre parce que, bien qu'historien de l'art de formation, Pierre Lhote néglige «l'exercice de style», les attendus, la démonstration de l'originalité par la notoriété. Jorn, Appel et Alechinsky ont voulu très fortement échapper aux déterminations habituelles; il importait donc de ne pas corseter leur travail qui se situe en peinture parmi les plus originaux du siècle. Le chercheur s'est intéressé à l'émotion esthétique, à cet enthousiasme moteur, à cette force ludique qui poussent l'artiste hors de ses répertoires habituels. Pour ce faire, il a travaillé sur l'emploi de la couleur qui chez Appel, Jorn et Alechinsky est, à des degrés divers, le vecteur de l'innovation.
La parole et l'action dans Der Schwierige, tel est le point de départ de cette série d'études sur la littérature autrichienne, axée sur les différentes étapes du procès du langage, que Marie-Josèphe Lhote consacre plus particulièrement aux comédies de Hugo von Hofmannsthal. Chemin faisant, des concordances ponctuelles s'établissent tout naturellement avec d'autres dramaturges autrichiens: Grillparzer, Ferdinand Raimund, Nestroy. Dans le cadre de ce procès du langage et face à une redéfinition de la notion de «personnalité», Marie-Josèphe Lhote est amenée, élargissant magistralement son travail, à établir de fructueux parallèles avec d'autres auteurs de cette première moitié du XXe siècle, tels Franz Kafka et Paul Valéry.
«L'événement» de la guerre de 1939-1945, issue de conflits nationaux qui mettaient aux prises l'Allemagne et la France, fut ressenti par Paul Valéry comme une lutte fratricide et vaine qui foulait aux pieds d'authentiques affinités intellectuelles et artistiques entre ces deux peuples. Réalisant alors un projet ancien auquel il avait déjà consacré de nombreuses notes et à la maturation duquel non seulement l'oeuvre faustienne de Goethe, mais encore la pensée de Nietzsche et la musique de Wagner avaient contribué, Paul Valéry, en véritable «poulpe», s'est nourri de ces trois grands génies pour créer avec Mon Faust une version originale du mythe européen.
L'oeuvre de Van Gogh, sa technique, sa «manière» particulière ont déjà suscité une littérature critique des plus abondantes. Cependant, personne n'a réussi à montrer l'enchaînement logique qui mena le peintre du pays brabançon à ces audaces picturales - couleurs jaillies du tube, poussées à leur plus grande intensité, champs tumultueux, visages tourmentés, cernes autour des formes... Van Gogh voyait-il le monde ainsi ou le transposait-il arbitrairement? A ces questions, le présent essai se propose de répondre, en faisant litière des idées reçues sur le «don inné» de Van Gogh et sur son génie voisin de la folie. Il ignore également les stéréotypes qui cherchent à enfermer le peintre dans une école ou un mouvement artistique. Se fondant sur un choix personnel de lettres de Vincent Van Gogh et sur l'étude conjointe de ses toiles, Pierre Lhote analyse avec sa sensibilité de peintre les différentes étapes de l'acquisition par Van Gogh de la maîtrise de son art, évolution qui mènera l'artiste à dépasser la technique pour la soumettre à l'effet de la toile, à sa vérité, et fera de lui l'un des pères de l'art actuel.