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Rocher
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Entre radio, télévision, chroniques, essais, romans, nouvelles, voyages, j'ai toujours trouvé le temps de saisir l'éphémère et d'en dire la légèreté. L'essentiel n'est-il pas de fixer au quotidien quelques itinéraires et d'ainsi ordonner la mémoire ? Manière de poser des bornes sur des parcours cahotants. Les diaristes sont de deux sortes. Il y a d'un côté les cabossés de la vie qui racontent leurs intimes malheurs, de l'autre les curieux, moins nombrilistes, qui regardent le monde en évitant de se lamenter. Je serais plutôt de ce dernier versant. Le journal m'est une quête permanente des comportements de nos contemporains. Je rabâche volontiers l'antique sentence de Lao Tseu : la façade d'une maison n'appartient pas à celui qui la possède mais à celui qui la regarde. Le Journal, c'est encore autre chose. Une façon de respirer l'époque, de regarder nos semblables, de retenir les mois qui passent de plus en plus vite. Nous voilà déjà en 2005, au XXIe siècle. Ai-je bien vu ce que je suis censé comprendre ? Je n'en suis pas si sûr. J'aurai habité du moins ces deux dernières années que, par souci d'esthétisme, je peins quand même en bleu. Inconscience de l'optimisme. Jacques Chancel
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Radioscopies jacques chancel jorge louis borges
Jacques Chancel
- Rocher
- 15 Janvier 1999
- 9782268032528
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1999-2002. Quatre années de plus à une somme de journaux déjà parus (Le Temps d'un regard, Le Guetteur de rives, Le Désordre et la Vie, Le Journal d'un voyeur, L'Or et le Rien), dans lesquels Jacques Chancel s'applique à consigner l'essentiel des jours. Rien à voir, dirait cet amoureux de la musique, avec les mélodiques Quatre Saisons de Vivaldi, que cette cacophonie d'un monde occupé à franchir le passage pourtant exceptionnel d'un millénaire finissant à un autre commençant. Sur la partition de son Nouveau Siècle, l'auteur inscrit, souvent avec agacement, appréhension ou douleur, le surcroît de bémols, de notes aigres-douces, de disharmonies qui continuent de le polluer. Jusqu'à ce contre-ut assourdissant poussé un mémorable 11 septembre, dont la planète n'a pas fini de résonner... Le meilleur atout de la bêtise méchante des uns, c'est encore l'intelligence généreuse des autres, notait Jules Renard. C'est pourquoi Nouveau Siècle, loin de se limiter à une observation attristée des premiers, témoigne aussi d'une sorte d'anthropophagie de son auteur pour les seconds. Généreux lui-même, Jacques Chancel cherche, repère, loue sans ratiociner celles et ceux - politiques, musiciens, sportifs, écrivains ou simples quidams - qui, envers et contre tout, s'acharnent à recomposer des hymnes à la joie, des hymnes à la vie et à la création. Tourbillon de fervents et d'hommes de bonne volonté dans lequel, comme à son habitude, Jacques Chancel s'oublie, s'efface, se tient en retrait. Ici, en effet, amateurs de révélations trop intimes, de déballages ou d'états d'âme privés s'abstenir. L'homme Chancel, qui l'a souvent déclaré ou écrit au fil de ses journaux, ne " s'intéresse pas ". Seul, cet Autre généreux, intelligent - ou parfois même totalement défait et raté - peut le surprendre, l'émouvoir, l'enrichir, encore et toujours.
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Chacun de nous porte en lui ses îles, ses refuges qui le protègent et le ressourcent : ce peut être une rencontre, un livre, une maison, un paysage, un souvenir. Jacques Chancel raconte ses îles : la Bigorre où sa maison s'enracine, la jungle cambodgienne où il rencontra Cambus, un héros mystérieux, ses amitiés avec Joseph Delteil et Jorge Amado dans sa splendeur brésilienne, les heures passées avec Albert Cohen, Marguerite Yourcenar, Jorge Luis Borges, ou des inconnus qui eux aussi ont à dire. Autant d'étapes riches d'anecdotes et de notations, qui sont aussi celles d'un voyage intérieur. Tant qu'il y aura encore des îles a obtenu le prix des Maisons de la presse en 1981 lors de sa première publication chez Hachette-Littératures.