Les paillettes, les plumes et les strass, les bouquets de fleurs, les hommes fous d'amour, l'ivresse des applaudissements... tel est le quotidien de la belle Ida Sconin, célèbre meneuse de revue parisienne. Mais le temps passe impitoyablement et il devient de plus en plus difficile de faire illusion. L'auteur de l'inoubliable Suite française nous offre deux nouvelles d'une douloureuse lucidité, deux destins de femmes cruels et intimistes.
Portrait sans concession d'un homme « condamné à vivre », Le pion sur l'échiquier est, dans l'oeuvre d'Irène Némirovsky, un roman à part, qui n'est pas sans rappeler Le Feu follet de Drieu la Rochelle. Marié, père d'un enfant, Christophe Bohun est rongé par le mal-être. Ni son métier, ni sa femme, ni son fils, ni son père vieillissant ne trouvent grâce à ses yeux ; par dessus-tout, il déteste sa propre vie routinière, son manque d'envergure. Son seul plaisir, avec le vague souvenir d'une femme jadis aimée, est le sentiment de liberté que lui procure sa voiture. Lorsque, ruiné, il est obligé d'un renoncer, il prend soudain conscience de cette « peine profonde et incompréhensible » qui le submerge depuis si longtemps. Sur fond de crise économique, dans la France des années trente, Irène Némirovsky exprime avec beaucoup de lucidité le désespoir d'un homme dont le paysage intérieur se confond avec le sombre tableau de l'époque, au fil d'un roman cruel qui n'a rien perdu de sa force.