Dans une synthèse très complète, l'historien Chris Millington offre une approche renouvelée de la France durant les années 1940-1945 au prisme de l'historiographie la plus actuelle:la question du genre, notamment le rôle des femmes combattantes, la question raciale éclairant des épisodes méconnus de la guerre dans l'Empire français ou encore le long travail de la mémoire.Au fil d'une chronologie resserrée, l'auteur raconte cette histoire selon les temporalités des différents territoires de la France:la guerre y a trouvé des prolongations différentes que l'on soit à Paris, en Zone sud, en Algérie ou en Guadeloupe...Loin des grands affrontements politiques à la Une des journaux, l'ouvrage s'attache aux parcours des Français confrontés à un événement d'une telle ampleur historique qui est associé pour beaucoup à la souffrance due à la faim ou aux persécutions.Des figures héroïques ou de simples témoins s'en détachent à l'instar de la résistante fondatrice du réseau du musée de l'Homme, Agnès Humbert ou du journaliste Léon Werth, qui donnent à ce livre une dimension très vivante et presque palpable plus de soixante-quinze ans après.
Les émeutes menées par les ligues fascistes à Paris place de la Concorde, au soir du 6 février 1934 constituent sans doute la plus grave crise politique que connue la France durant l'entre-deux-guerres. Pourtant, à ce jour, il n'existait en français aucune étude historique entièrement consacrée à ces émeutes fondée rigoureusement sur les archives. Exploitant toutes les sources disponibles (archives, journaux, mémoires), Jenkins et Millington retracent minutieusement la préparation, le déroulement et les multiples conséquences de ces émeutes tragiques.
Les auteurs établissent non seulement les faits et les responsabilités avec précision, mais ils apportent aussi un éclairage nouveau sur les grandes questions qu'a suscitées cet événement complexe : dans quelle mesure la république fut-elle menacée ? Quel fut le rôle précis des anciens combattant ? Quelles étaient les motivations et les obectifs des différents groupes d'émeutiers ? Replaçant le 6 février dans le contexte des années 1930, les auteurs critiquent la méthode et les partis pris des historiens tels que Serge Berstein, Michel Winock et Antoine Prost qui nient l'existence d'un fascisme français durant l'entre-deux-guerres.
Rejetant la thèse d'une allergie française au fascisme, ils prouvent que des ligues comme les Croix-de-feu ou bien la Solidarité française n'avaient rien à envier à leurs homologues italien et allemand en matière d'antiparlementarisme, d'anticommunisme et d'autoritarisme. S'il fallut attendre l'invasion allemande pour que s'établisse avec Vichy un régime fasciste en France, ce ne fut pas en raison d'une "immunité" supposée de l'opinion française contre une telle idéologie.
Ce qui empêcha le fascisme d'arriver au pouvoir suivant les scénarios italien et allemand, ce fut la vivacité de ses adversaires communistes et socialistes qui surent, mieux qu'ailleurs, s'organiser et agir de façon à ne rien céder à l'extrême droite.