Hitler fait-il vendre ? On peut se poser la question face à la recrudescence de films sur le national-socialisme réalisés dans l'Allemagne réunifiée : La Chute, Opération Walkyrie, Rosenstrasse, Sophie Scholl. Ces films ont pour thèmes principaux les dernières heures du régime, la résistance allemande ou la persécution des Juifs. Partant du constat que le cinéma se fait le reflet des interrogations et des aspirations qui travaillent une société à un moment donné de son histoire, les auteurs ont étudié les fictions cinématographiques et télévisuelles allemandes des deux dernières décennies. En croisant les enjeux mémoriels et esthétiques, ils se sont interrogés sur les possibilités et les formes de la représentation et de la transmission : le regard sur les victimes et les coupables a-t-il évolué ? Des tabous sont-ils brisés, par exemple dans la représentation du dictateur ? Peut-on parler d'un changement de paradigme dans l'Allemagne réunifiée ? Les auteurs, des chercheurs germanophones et francophones de différentes disciplines (Études germaniques, Histoire, Cinéma, Esthétique), proposent une approche transdisciplinaire et novatrice sur un sujet en prise sur l'actualité allemande qui constitue un champ de recherche peu exploré en France.
Au mois de novembre 2010, Pascal Quignard et la danseuse de butô Carlotta Ikeda ont créé la pièce medea, sur la scène du Théâtre Molière, à Bordeaux. Cette rencontre de la danse et de la littérature était-elle donc marquée du sceau de l'inéluctable ? Oui, parce que la danse est au coeur de l'oeuvre de Pascal Quignard, depuis toujours, et elle éclaire indirectement le sens de ses collaborations multiples, avec des peintres, des musiciens, des comédiens. Affirmer la nécessité esthétique et logique de cet événement peut cependant surprendre car, dans le premier temps de l'oeuvre, le corps et sa danse n'apparaissaient guère. Pourtant, quand je l'interrogeais à ce sujet dans les entretiens que nous avons menés ensemble en 2000, il répondit ceci : « La danse est un art, bien sûr. J'en parle très souvent, quoi que vous en disiez, sous la forme du corps humain tournant la tête, tombant les bras levés, versant en arrière. ». Cette réponse m'a laissée songeuse. Je n'avais pas lu la danse dans son oeuvre, et c'est cette erreur de lecture - ou cette myopie - que l'écriture du présent essai a voulu corriger. Aussi ai-je souhaité lire ici ce que je n'avais pas lu, comprendre ce que je n'avais pas compris, en retraçant l'histoire de cette présence, à la fois fantomatique et réelle, du corps et de sa danse dans l'oeuvre.
L'interrogation sur les instruments intellectuels de l'interprète est au coeur du présent volume. Indépendamment d'une orientation théorique ou philosophique prédéfinie, il s'agit ici de présenter certains des concepts où s'articule la rationalité herméneutique.
À l'heure où l'on s'inquiète de la place de la littérature française sur la scène internationale, cet ouvrage établit l'état actuel des recherches qui lui sont consacrées dans le monde. Il présente les enseignements, travaux et publications, et met en évidence les particularités observables selon la diversité des zones géographiques, linguistiques et culturelles. Après la domination successive des écoles formalistes et structurales, puis de celles issues de la French Theory et de la déconstruction, aucune méthode ne semble aujourd'hui s'imposer, et la recherche, désormais plus syncrétique, préfère croiser des approches de nature diverse. Quelques-uns des meilleurs spécialistes mondiaux montrent ainsi quels sont, depuis le basculement d'un siècle à l'autre, les écrivains et les esthétiques les plus étudiés, les méthodes critiques privilégiées et les relations qu'elles entretiennent avec les autres disciplines de la pensée.
Les nombreux travaux réalisés en collaboration avec des artistes, peintres, plasticiens ou musiciens constituent désormais la majeure partie de l'oeuvre de Michel Butor. Ils demeurent cependant peu connus, et sont rarement envisagés par une critique qui s'en tient toujours aux romans de l'écrivain. Or ces réalisations visent à promouvoir un « dialogue avec les arts » où s'affirme la radicalité d'une démarche résolument moderne. Ce « dialogue » permet de mieux comprendre, rétrospectivement, le véritable projet des premiers livres (de L'Emploi du temps, à Description de San Marco...) en les situant enfin dans une entreprise d'envergure. Surtout il manifeste l'émergence d'une réflexion critique originale sur le statut de la création artistique dans le monde contemporain, saisi à travers ses enjeux poétique, politique, esthétique et philosophique.
Réda marche, qui s'en étonnerait ? Il s'engage dans une rue - la première venue est toujours la bonne -, tombe sur une impasse, rebrousse chemin, s'arrête pile pour suivre des yeux le jeu des nuages, peste contre les automobilistes, remonte un boulevard, échange quelques mots avec un passant, emprunte une ruelle, tombe en arrêt devant une vitrine de jouets anciens, remonte un boulevard, achète La Vie du rail. Ses pas composent ainsi un jardin aux sentiers qui bifurquent. Peu lui importe de se perdre : on est toujours perdu. Le fil d'Ariane, celui que le critique voudrait lui nouer à la patte, pour pouvoir le suivre - le filer -, il l'arrache aussitôt, avec impatience. Que cherche-t-il ? Il ressemble à un homme qui aurait perdu quelque chose et qui n'aurait de cesse de le retrouver. Mais voilà, et c'est une difficulté de taille, il ne sait plus ce qu'il a perdu. Peut-être même, cet objet, l'a-t-il aperçu, pris en main, puis rejeté. C'est ainsi que dans les contes le héros croise la bonne fée sans lui accorder plus d'importance qu'à une personne ordinaire et ne se rend compte qu'après de sa méprise. Trop tard ! Aussi est-il un écrivain mélancolique, c'est-à-dire un artiste condamné à chercher inlassablement un objet perdu sans remède. Sans autre remède, en tout cas, que de continuer à lancer sa phrase à l'aveuglette, une phrase, puis une autre, et une autre encore. Chacune vient s'enrouler autour de ce centre absent. Cette recherche inquiète n'en est pas moins drôle. Le saturnien, par pudeur et pour la tenir à distance, retourne sa détresse en humour, constituant ainsi un mélange instable, mobile, capricieux. Nous avons donc suivi Réda dans sa course, d'un bord à l'autre de son oeuvre, tantôt de loin, tantôt presque au coude à coude. Nous aurions aimé le lui retrouver, cet objet perdu, et le lui offrir, à supposer qu'il existe. Rien n'est moins sûr. A défaut, ce petit livre d'accompagnement.
Réunissant dans une perspective interdisciplinaire les contributions de philosophes et de spécialistes d'analyse du discours, ce volume propose quelques pistes pour l'étude du dialogue philosophique considéré comme un genre textuel. Une philosophie ne saurait être comprise sans référence aux lieux et aux conditions de sa textualisation, aux formes du discours qui la mettent en oeuvre, aux genres qu'elle emprunte à la littérature, aux discours religieux, juridique, scientifique. Le dialogue philosophique est à ce titre exemplaire : son usage constant, comme pratique orale codifiée ou genre textuel (on connaît son rôle dans la philosophie antique depuis Platon, et son retour en force dans la culture de la Renaissance), en fait un objet d'étude quantitativement significatif, susceptible de donner lieu à des comparaisons, voire à certaines généralisations. Ce recueil souhaite favoriser une réflexion sur sa nature et ses fonctions, sur les méthodes d'investigation qui permettent d'en rendre compte en proposant des études de cas exemplaires chez des auteurs variés (Platon, Galilée, Descartes, Leibniz, Hume, Shaftesbury, Diderot) ou dans une période, un mouvement caractéristique : La Renaissance, le Libertinage érudit aux xviie siècle.
À travers l'expérience de Comités de quartier et d'associations dites « de jeunes » à Roubaix, cet ouvrage s'attache à analyser certains des enjeux contemporains liés à la citoyenneté et à la participation. Quelle est la pertinence de l'échelle du quartier pour la mise en oeuvre d'un renouvellement démocratique ? La proximité géographique induit-elle nécessairement la proximité politique ? À quelles conditions la participation, notamment à travers l'insertion des citoyens dans un nombre croissant de politiques publiques contractuelles, permet-elle de construire des sens communs ? Comment s'articulent échelles locale et nationale en matière de représentation de la citoyenneté, en particulier pour ceux qui sont (vus comme) d'origine immigrée ? Que signifient pour les citoyens eux-mêmes ces notions de « participation » ou de « démocratie locale » ? Bref que peut nous apprendre aujourd'hui, quant aux limites de certains modèles, l'observation localisée d'engagements publics ?
Une expérience d'une ampleur sans précédent est en train de se réaliser sous nos yeux ; elle est involontaire et non maîtrisée mais elle concerne la planète toute entière : la composition de l'atmosphère a subi, subit encore et subira des modifications qui devraient entraîner des changements importants du climat. Si le thème est d'actualité, les déclarations des uns et des autres ne permettent pas toujours d'y voir clair. Le but de ce livre est de fournir les éléments scientifiques nécessaires à une compréhension personnelle du sujet. Qu'est ce que l'effet de serre ? Quels sont les grands principes qui régissent le climat de la planète ? Comment la machine climatique fonction ne-telle et comment l'activité humaine la perturbe-telle ? La Terre se réchauffe-t-elle vraiment ? Comment situer l'évolution récente du climat par rapport au passé ? Le réchauffement est-il dû à l'activité humaine ? Pourquoi certains scientifiques ont-ils des avis divergents ? À quoi s'attendre au cours de ce siècle ? Qu'est-ce que la lutte contre l'effet de serre ? Quelles seront les conséquences les plus probables du réchauffement prévisible ? Ce livre tente de répondre à ces questions en distinguant le certain, le probable et le moins sûr, sans éluder les difficultés mais en s'efforçant de rester très accessible.
Dresser un état des recherches dans le domaine du « français » et de son enseignement, c'est le défi que relèvent vingt-trois chercheurs en littérature, sciences du langage et didactique du français, à travers cet hommage à André Petitjean, fondateur de la revue Pratiques, dont les travaux sont reconnus dans ces trois disciplines. Le lecteur trouvera donc dans cet ouvrage, outre une réflexion sur l'originalité du parcours d'André Petitjean, aussi bien des articles sur des phénomènes langagiers, tels la phrase ou le genre, que des contributions sur le dialogue théâtral, sur l'enseignement de la littérature et son histoire ou sur la didactique de l'écriture.
Ce volume est le produit d'une rencontre entre historiens, germanistes et spécialistes en information-communication. Si l'historiographie de l'antiaméricanisme français est bien nourrie, de même que celle de l'américanisation, sous l'impulsion de travaux en histoire culturelle et en histoire économique, il est rare de les trouver confrontées dans un même volume. C'est une des ambitions de ce livre qui s'est attaché à proposer, des interventions à dimension comparative et en regard les unes des autres. Ainsi, les relations entre les milieux économiques français et américains sont étudiées de part et d'autre des deux conflits mondiaux et permettent de mesurer les éléments de continuité dans les relations entre les élites économiques françaises et américaines sur fond de promotion de la rationalisation industrielle durant les années vingt et de la productivité au lendemain du second conflit mondial. Les contributions sur l'antiaméricanisme se situent à différentes échelles : surplombante lorsqu'il s'agit de prendre la mesure de la diversité des antiméricanismes des deux côtés de l'Atlantique. Bilatérale à travers l'exemple américano-helvétique. Nationales à travers l'exemple de l'Italie et de la France des années trente dont les deux antiaméricanismes sont plus proches qu'on ne pourrait le penser. La dernière partie de l'ouvrage porte sur la place des médias et de la culture devant l'américanisation et l'antiaméricanisme, abordée via le cinéma, la bande dessinée, la musique rock et la littérature.
Après avoir considéré les forêts comme une source de matière première quasi inépuisable pendant des décennies, le Canada s'est lancé dans une approche durable au début des années 1990. Ce changement de cap a de quoi surprendre. Voilà que soudainement un des pays phares d'une vision très industrielle des forêts, s'érige en bon élève voire en pionnier d'une politique forestière qui s'inscrit en total contrepoint de ce qui s'y est fait jusqu'alors. Une optique durable qui supplanterait l'horreur boréale en quelque sorte. Rallions-nous à l'évidence. Une telle réorientation ne va pas sans mal tant les intérêts économiques en jeu sont présents. En dépit de cette réalité très prégnante, les autorités fédérales se sont engagées dans toute une série de mesures pour promouvoir le développement durable. En cherchant à comprendre comment cela est possible, nous en arrivons à mettre en évidence le rôle d'un socio système très dense et complexe qui s'est profondément renouvelé depuis plus d'une trentaine d'années. Se déployant du local au global, ces groupes d'acteurs forgent un véritable construit social autour des forêts sans lequel le développement durable serait vraisemblablement impossible. Autrement dit cette nouvelle politique forestière telle qu'elle existe au Canada est d'abord et avant tout reflet de ce que le socio système en fait.
Angelina Aleksandrova propose une caractérisation linguistique fine des noms qui dénotent l'être humain dans les différentes phases de la vie (bébé, enfant, etc.) et questionne, chemin faisant, la façon dont le langage conceptualise les facettes constituant notre identité (âge, sexe, profession...). Morphologiquement simples et d'un sémantisme transparent, les noms d'âge (NA) ne posent pas, a priori, de difficultés pour l'analyse linguistique. Cependant, les outils et les modèles existants en sémantique lexicale se heurtent à un paradoxe : les NA expriment des propriétés vues en langue comme étant à la fois immuables et intrinsèquement transitoires pour un être humain. Pour rendre compte de ce fonctionnement hybride, ce volume privilégie les analyses sur données empiriques et articule deux notions apparemment inconciliables : la notion de prédicat sortal, empruntée aux philosophes et la notion de phase, qu'on associe d'emblée au domaine verbal.
La « reconnaissance » est à l'ordre du jour de débats tant scientifiques que politiques. Depuis quelques années, la philosophie politique, sous l'impulsion notamment de C. Taylor, M. Walzer, A. Honneth, N. Fraser, fait une place importante à ce concept pour penser la manière dont les sociétés contemporaines « tiennent ensemble », alors qu'elles sont marquées par la pluralité des identités, la montée en puissance de l'individu et de la subjectivité. C'est à l'analyse concrète de processus de reconnaissance que s'intéressent les études sociologiques et anthropologiques proposées dans cet ouvrage. Elles mettent « à l'épreuve » les approches philosophiques de la reconnaissance au regard d'expériences situées et dans des contextes identifiés (immigration, mouvements alternatifs, exclusion sociale, relations aux institutions, droits civiques, action humanitaire). Elles questionnent également le sens de « la reconnaissance » dans des contextes nationaux variés. Au total, l'ouvrage propose moins une théorie de la reconnaissance qu'une méthode d'exploration de la reconnaissance comme figure morale et politique des sociétés contemporaines.
Cet ouvrage inscrit la réflexion sur la laïcité dans la longue durée de l'histoire française et allemande, tout en croisant les approches disciplinaires, afin d'éclairer respectivement chacun des deux modèles dans sa spécificité. Les contributeurs (historiens, philosophes, théologiens, juristes, sociologues, germanistes) s'y écartent de conceptions philosophico-idéologiques de la laïcité et se placent sur le terrain de l'histoire et du droit pour se mettre à distance de partis pris militants qui biaisent la réflexion sur un sujet si brûlant. Si le mot laïcité n'a pas d'équivalent en allemand, cela ne veut pas dire cependant que les réalités françaises et allemandes en la matière ne soient pas comparables. Divers éléments entrent en ligne de compte pour ce faire : outre le critère de neutralité réciproque du politique et du religieux, le respect de la liberté religieuse dans ses diverses facettes, la séparation des Églises et de l'État sous ses différentes formes, le statut juridique accordé aux sociétés religieuses, la mise en oeuvre du droit à l'incroyance. L'ouvrage, organisé selon une structure à la fois chronologique et thématique comporte, outre l'introduction, quatre parties où alternent analyses générales et études de cas : la laïcité dans l'histoire ; questions juridiques et politiques ; modèles allemand et français à l'épreuve de l'islam ; l'école face à la religion et à la transmission des valeurs en Allemagne et en France.
Art au même titre que la littérature et la peinture, le cinéma a ses auteurs. La cause est entendue. Les intellectuels s'y intéressent alors qu'ils le méprisaient il y a quelques décennies. Mais le cinéma « populaire » perdure. Il y a toujours un cinéma « de masse », « de grande consommation », où, comme à la belle époque d'Hollywood, l'action et le spectacle restent au premier plan. C'est toujours lui qui a la faveur de ce que l'on appelle le « grand public ». Hiérarchie, clivage même, qui, ravivant des préjugés (« le cinéma est un divertissement d'ilotes », la grande production est une « usine à rêve ») occulte la fonction culturelle du cinéma. Le cinéma de grande consommation n'a jamais été en effet, contrairement à certaines assertions, un opium du peuple ou un divan du pauvre, mais un miroir de la psyché collective. Les grands cinéastes classiques, dont certains étaient déjà des auteurs, savaient, en utilisant les genres et les codes du spectacle, donner corps à l'imaginaire collectif. Et ce sans le ravaler ni le mépriser : ils revisitaient les grands mythes. La sophistication de la production ne doit donc pas nous abuser. Des genres comme la sciencefiction, le fantastique... aidant, les mythes travaillent toujours les récits et les représentations. Quelques ruptures que l'on ait connues, quelque hiérarchie que l'on doive établir entre les oeuvres, il y a ici une continuité, un héritage culturel, méconnu par la critique et l'université, que le présent ouvrage se donne pour tâche d'explorer.
« Le changement par le rapprochement » était le mot-clé de l'Ostpolitik de Willy Brandt, mais le retour à une unité étatique entre la RFA et la RDA, sous quelque forme que ce fût, paraissait hors d'atteinte dans les années 1970 et même 1980. La démocratie de Bonn n'était plus considérée comme un « État provisoire », elle semblait inscrite dans la durée. La RDA avait obtenu la reconnaissance internationale qu'elle avait tant convoitée et elle offrait une image de stabilité. On avait tout lieu de penser que les architectes de l'Ostpolitik avaient échoué. Malgré quelques ouvertures, un renforcement des relations commerciales, de nouvelles facilités pour des échanges et des rencontres entre Allemands de l'Ouest et de l'Est, le rideau de fer paraissait immuable et l'unification tributaire d'un processus dont la durée était imprévisible. Mais à partir de l'été 1989 le monde allait constater que l'Histoire n'avait pas dit son dernier mot dans la « question allemande ». En quelques semaines les manifestants de Berlin-Est, de Leipzig et d'autres villes est-allemandes provoquaient la chute du Mur et la fin du régime communiste. En un an à peine, l'Allemagne retrouvait son unité. À partir des résultats de la recherche récente cet ouvrage a pour objet d'analyser les convergences et les liens entre les deux Allemagnes dans les années 1970 et 1980, au-delà de la division, proposant ainsi des explications à deux aspects surprenants de l'unification, l'absence de violence apparente et la rapidité avec laquelle elle se fit.
Le 9 novembre 1989 tombe le Mur de Berlin. En Europe et ailleurs circulent de nombreuses hypothèses sur le devenir de l'Allemagne à court et moyen terme - des « paysages florissants » promis aux Allemands de l'Est par le Chancelier Kohl, à la crainte d'une domination économique allemande accrue sur l'Europe, en passant par des inquiétudes concernant la pérennité de l'engagement européen et atlantique de la République fédérale. Vingt ans après, où en est l'Allemagne ? Quels ont été les changements les plus significatifs ? Quels sont les éléments de continuité, d'inflexion, de rupture ? Le processus d'unification et l'intégration des nouveaux Länder ont entraîné des changements structurels. Mais d'autres facteurs, internes et externes, ont joué un rôle déterminant dans l'évolution du pays : l'intégration européenne, le bouleversement du contexte international, les mutations de la société allemande elle-même. À l'Est comme à l'Ouest, l'Allemagne est profondément transformée. Dans le champ économique et social, l'unification a pesé lourd, mais la mondialisation et les régulations européennes ont eu elles aussi un impact considérable. L'ensemble de ces facteurs influe également sur le fonctionnement de la vie politique et du fédéralisme allemands. Pour les relations internationales enfin, la place et la politique de la RFA sont liées à son nouveau statut, mais elles sont aussi conditionnées par la profonde mutation des équilibres et des enjeux internationaux ces vingt dernières années.
En 1945, après avoir constitué un puissant instrument de propagande sous le Troisième Reich, le cinéma allemand est réduit à néant et se trouve soumis au bon vouloir des puissances d'occupation. Tout en affirmant sa volonté de dénazifier et de rééduquer les Allemands, chacune d'elles entreprend de relancer et de développer les activités cinématographiques d'une façon conforme à ses intérêts. Cette étude se propose de cerner les caractéristiques, l'évolution et le rayonnement de l'action menée par les Français. L'importance qu'ils accordent au cinéma se traduit par de nombreuses mesures : réouverture des salles, installation d'ateliers et de studios, création de sociétés francoallemandes, sélection et diffusion de films français, organisation de galas et de festivals, mise en place de ciné-clubs... Si certaines réalisations s'inscrivent dans une politique de rééducation, d'autres dénotent une volonté de rehausser le prestige de la France et d'implanter le cinéma français en Allemagne. En même temps, des accords passés avec les autres puissances d'occupation témoignent de l'impact du contexte international (émergence de la Guerre Froide et adhésion progressive de la France à la politique anglo-américaine) sur le cinéma.
Albert Thibaudet (1874-1936) est le critique littéraire de La Nouvelle Revue Française dans l'entre-deux-guerres, l'auteur de La République des Professeurs et d'une fameuse Histoire de la littérature française. René Rémond voit en lui le fondateur de l'histoire des idées politiques. Titulaire d'une chronique enviée à La NRF, il se tient en dehors de son cercle. Héritier, il vit comme un boursier. Humaniste à la culture encyclopédique, c'est un gourmand et un gourmet. Disciple de Bergson, il analyse aussi finement le radicalisme que le traditionalisme de Barrès ou de Maurras. Enraciné dans sa Bourgogne natale, il est ouvert à bien des cultures. « Poilu de l'arrière » pacifique et patriote, il devient un européiste convaincu et un observateur non engagé de la vie politique et intellectuelle de la Troisième République. Fondée sur de nombreux articles et livres, de multiples correspondances et des inédits, cette biographie intellectuelle s'attache à montrer les divers aspects et apports d'un homme singulier, dont l'oeuvre fragmentée est aussi célèbre par quelques formules que méconnue dans sa richesse et sa diversité. Thibaudet, liseur professionnel, parce qu'il est un extraordinaire agent de liaison entre littérature, histoire et philosophie, est aussi un jalon du renouveau de l'histoire politique et culturelle.
Basé sur une série de cours initialement adressés aux travailleurs sociaux en formation, le livre alimente la culture professionnelle des étudiants des métiers de la relation et de l'éducation. On y aborde une suite de thèmes contribuant à composer une formation fondamentale, et donc humaniste. D'où émergent nos conceptions éthiques ? Qu'est-ce que le respect et la communication intersubjective ? Quels rôles attribuer au langage ? Comment comprendre l'oxymore « accompagnement éducatif » ? Pourquoi faire l'éloge de la différence ? Au-delà d'une série de questions, celle-ci : quelle conception de l'homme pour quelle conception de l'éducation ? Car c'est aussi d'anthropologie philosophique dont il s'agit : que nous dit sur nous-mêmes cet ouvrage ? L'homme comme système perceptif interprétatif, l'homme cadre référentiel, sujet évaluant, et donc auteur et responsable. Sous l'angle du rationalisme critique, c'est essentiellement du sens des valeurs et de la faculté de juger dont il est ici question. Que serait la formation sans ces considérations ?
Salariés ou candidats à l'emploi, nous sommes de plus en plus souvent évalués. Mais comment le sommes-nous ? Le consensus actuel sur la nécessité et le bien-fondé de l'évaluation ne doit pas empêcher de s'interroger sur la façon dont le jugement se fabrique. Certaines pratiques et méthodes ne sont-elles pas susceptibles de produire des exclusions durables et de nourrir un sentiment d'insécurité ? Pour répondre à cette question, ce livre explore une large gamme de situations dans lesquelles la valeur des personnes est mise à l'épreuve, que ces personnes soient au coeur ou aux portes des entreprises, en cours d'insertion ou en quête d'emploi.
La philosophie de Nietzsche est une philosophie perspectiviste. Elle l'est, d'abord, par son contenu interprétatif, puisque les volontés de puissance qui constituent indéfiniment les significations du monde, sont des centres d'interprétation et que ces interprétations centrées sont autant de perspectives qui s'affrontent les unes les autres. Mais elle l'est, aussi, en ce qu'elle s'offre elle-même, conformément à son perspectivisme assumé, à une multiplicité de commentaires, tous légitimes à condition de s'ouvrir, de manière forte, aux autres, et de les laisser se déployer pour les dépasser dans le jeu indéfini des herméneutiques. Ce livre sur la philosophie de Nietzsche part d'une hypothèse selon laquelle la perspective d'interprétation morale de cette philosophie est sans doute celle qui permet le mieux, d'une part, de rendre compte de son développement et de sa méthode propre et, d'autre part, de s'ouvrir aux autres perspectives interprétatives sur elle, en les comprenant sans les réduire, tout en les subordonnant ou hiérarchisant de façon rigoureuse. Ayant d'abord mis à l'épreuve cette hypothèse du point de vue d'une lecture interne de la genèse et la structure méthodique du questionnement de la morale par Nietzsche dans nos deux premières parties, notre propos est ensuite d'entendre « le questionnement moral de Nietzsche » au sens d'un génitif objectif de l'expression, par suite de reconstruire, dans notre troisième partie, « trois mises en questions morales de Nietzsche », pouvant émaner de trois perspectives philosophiques majeures sur le problème moral : kantisme, fichtéanisme (auquel le questionnement weilien est largement associé), matérialisme. La meilleure manière de présenter ces mises en questions nous a semblé consister dans l'introduction d'une sorte de dialogue entre des pensées philosophiques toujours vivantes, de sorte que cette troisième partie se termine par un essai d'envisager comment et jusqu'où Nietzsche aurait pu répondre à ces objections tant supposées que réelles.
Accordant l'importance essentielle aux divers types de récit, aux multiples façons de raconter et à la variété des effets produits, les textes réunis dans cet ouvrage remettent en cause l'idée qu'il faille toujours rechercher « une » structure « du » récit. L'accent porte, d'abord, sur la diversité selon le contenu : chaque enfant-auteur est ainsi en mesure de raconter de diverses manières en fonction de ce qu'il raconte. L'accent porte, ensuite, sur la diversité des styles individuels à laquelle les enfants n'échappent pas. L'accent est, enfin, mis sur la diversité des types de lectures, c'est-à-dire des points de vue propres au récepteur. Dans l'ensemble de ces directions, l'auteur travaille la dimension des significations, qui se dessinent dans l'allure du texte plutôt qu'elles ne sont, à proprement parler, dites. Ce qui le conduit à ne jamais négliger les types d'atmosphères et de ressentis qui font le plaisir du partage de ces textes. Cela amène également Frédéric François à faire la part respective de ce que l'enfant doit acquérir, apprendre et de ce en quoi il reste nécessaire qu'un récit d'enfant ne soit pas une mauvaise copie de récit adulte. Ces considérations modifient évidemment l'image qu'on peut se faire de l'adulte pédagogue et de son rôle auprès des enfants, particulièrement de son écoute et de son aide.